L'identité

Plusieurs billets portent sur le dégoût qu’inspirent les gestes du Nabot. Se saisir d’enfants dans les trains qui partent pour des colonies de vacances. Peut-on imaginer plus bas. Tout cela parce que certains sont français et d’autre non. Mais qu’est-ce que cela veut dire être Français, Québécois, Canadiens, Noirs, Amérindiens, Inuk? Avant le papier qui certifie l’identité, qu’est-ce que l’identité?

Il existe certainement des différences culturelles entre un Français et un Québécois. Mais où est la coupure? Est-ce que le plus Québécois des Français est plus Français que le plus Français des Québécois? Je ne crois pas. Même si chacun veut marquer sa différence, pour la plus part, ils veulent quand même être ensemble, aussi il y a facilement acceptation de l’autre dans ce qu’il est pareil et si différent. C’est vrai qu’une distance se crée quand l’autre ne veut pas « être ensemble », c’est extraordinairement difficile à définir ce qu’est l’acceptation ou le refus d’ « être ensemble ».

Ce que le Nabot fait, n’a rien à voir avec la présente réflexion. La France avait besoin d’esclaves pour accomplir les sales boulots, maintenant que cet esclavage est délocalisé hors de la vue des bonnes gens, on a plus besoin des esclaves locaux. Que cela fasse un an ou trois générations, le Nabot n’aura jamais la même identité qu’un esclave. Il veut rester esclavagiste.

Il existe aussi des différences biologiques. Le nomade de la forêt est biologiquement construit pour faire des repas de plus de 6000 calories, (certains jusqu’à 12000) et après passer 3 jours à ne boire que du thé. N’essayez pas vous n’êtes pas construit pour cela. Par contre, les Inuit ne peuvent se passer de manger durant plus de quelques heures, les gras rapides de la viande de phoque leur servant de combustible pour se protéger du froid, d’où leurs maigreurs extrêmes. C’est d’ailleurs de là que vient le terme péjoratif Eskimo : mangeur de viande crue. Le fait que maintenant il y ait des Inuit obèses et souffrant de diabète ne fait que confirmer ma thèse, nos aliments les tuent.

Pour le nomade de la forêt, le choix est clair. Ou il accepte de vivre dans des « réserves » une vie sans aucun sens, en rupture avec ses traditions, et disparaître victime d’alcoolisme, de désespoir, et de la violence qu’entraîne ce genre de vie. Ou bien d’être un mauvais indien qui vit dans la forêt qui refuse l’école à ses enfants, et qui empêche l’autre de développer un territoire qu’il a gagné à la guerre. Autant celui des réserves se voit refuser le droit d’être avec les blancs, autant celui de la forêt refuse radicalement d’être avec les blancs. Il reste à être un blanc comme les autres, et rejeter ce qui est le premier élément de sa culture : ne prendre que ce qu’il y a de « trop », ne jamais exploiter, ne jamais changer le monde à son profit. C’est dans un tel contexte que le racisme me semble inévitable.

Je ne peux pas être Inuk, la glace disparaît et c’est suicidaire. Je ne peux pas être amérindien parce que c’est dire qu’il y a au moins 4 milliards de personnes de trop sur cette petite terre. Je ne peux pas être de ceux qui détruisent cette planète à un rythme effréné. Je ne peux pas, je ne sais pas.

Être avec des papiers d’identité, c’est faire partie d’un groupe qui m’accepte comme membre de ce groupe à l’exclusion des autres. Comme je ne sais pas si les critères d’acceptation sont bons ou mauvais, je pense que c’est une raison suffisante pour refuser les papiers.

Moi, je ne sais pas, je ne sais rien. Je ne suis certainement pas dans le camp de ceux qui font descendre les enfants des trains parce que ça, je sais que c’est mal. Pour presque tout le reste, je veux refuser toute identité, parce que je ne sais pas ce qui est bien ou mal. Je veux simplement revendiquer d’être un enfant de la terre : il semble bien que cela soit déjà choisir mon camp.

Et pourtant je lutte, je te le jure, je lutte