Le Bio comme solution

Permettez-moi de radoter encore un petit coup. Hier, le billet sur la disparition probable du thon a entrainé de très intéressants commentaires et des liens très pertinents qui nous proposent d'autre choix pour favoriser notre continuité. Parce que si le thon est menacé, de toute évidence nous le sommes aussi. Cependant...

Oui, l'horticulture sans intrants pétroliers est possible, elle est même relativement productive par unité d'espace, et pourrait nourrir au moins la moitié de la population de la terre. Cela s'est vu en Amérique avant les Européens, les Mayas, les Iroquois ont encore beaucoup à nous apprendre sur l'efficacité de l'horticulture à des fins d'alimentation. Mais plus de 60% de la population travaillait à la production horticole. Koldo fait un lien vers un article décrivant la micro-agriculture bio-intensive, où je ne peux lire qu'une description des pratiques culturales des Iroquois (entre autre les trois soeurs).

Oui, il est possible de se passer des OGM, et des pesticides. Pour les engrais azotés(donc à base de pétrole) on peut peut-être aussi sans passer avec des baisses de rendement certes, mais qu'on peut compenser en mangeant beaucoup moins de viande. Mais cela demande une transformation radicale de nos modes de vie, de nos économies qui me semble bien difficile. La clé du développement d'un pays se passe généralement avec la transformation de son agriculture et de la disparition de la paysannerie vers la production agricole industrielle. Jusqu'à présent le développement a signifié de passer d'une société où plus de 40% de la population était paysanne, à moins de 5% d'agriculteurs très mécanisés. Il est important de faire baisser le coût des aliments pour moins payer les ouvriers et être « compétitif » (yeurk!).

Encore une fois, il n'y a pas de solutions individuelles. Même avec passablement de capital, il sera très difficile de survivre à la campagne en « paysan », i.e. Avec une horticulture bio, et en vendant les surplus pour acheter ce qu'on ne peut produire. Le coût du sol cultivable est franchement trop élevé pour qu'on puisse rentabiliser ce genre d'opération. Des semi-retraités peuvent retirer des parcelles de sol à l'économie de marché durant un certain temps, mais parce qu'ils ont des entrées de capital extérieur à la production. Ce n'est pas parce que le travail des horticulteurs est moins productif que le travail de l'agro-buisness, c'est qu'il n'ont pas accès aux subventions agricoles ( ou que marginalement), si bien que le coût de leurs produits n'a rien a voir avec le cout des produits de l'agro-buisness.

Je ne sais pas en Europe, mais ici l'essentiel du revenu de l'exploitation agricole se réalise par la rente foncière. Le prix des produits agricoles est nettement insuffisants pour payer le foncier et le travail. L'État finance une bonne partie des intérêts sur le foncier ( et décide de cette façon qui et comment on sera un agriculteur) et après 20 ans, l'agriculteur vend sa propriété et récolte son salaire en gain de capital. Il y a aussi diverses subventions pour s'assurer que le producteur agricole de crêve pas de faim durant ce temps. Le résultat, un agriculteur non subventionné, qui ne respecte pas la régie déterminée par les spécialistes de la production agricole subventionnée ne peut tout simplement pas survivre de façon décente. C'est comme ça qu'on a réduit l'Afrique à la misère la plus abjecte. Il en coute moins cher d'acheter des céréales sur le marché, que d'en produire soi-même si on n'est pas subventionné.

Les conditions très particulières de production au Brésil (très rentable avec peu de subventions) vont peut-être changer cette façon de faire, mais la direction n'est pas un retour vers le bio, mais à une augmentation l'intensité de production.

Sommes-nous prêt dans les pays développés à un retour massif à la campagne avec la baisse très importante du niveau de vie pour tous que cela signifie? Croyez-vous possible une réforme agraire où on dépossèderait les propriétaires des sols pour faire des distributions de parcelles à de nouveaux horticulteurs? Si oui vive le bio, sinon il va falloir trouver autres choses ( que je n'ai pas trouvé).

On voit qu'encore une fois, les solutions ne sont ni morales (ne dépend pas des volontés individuelles) ni techniques( ce n'est pas une question de "progrès"), elles sont POLITIQUES.