Un appel du Nord

Il y a un espoir de printemps. Une année nouvelle, un sablier nouveau pour mesurer l'espace à franchir pour retrouver le Nord.

Il est trois heures du matin, je n'arrive pas à dormir. J'entends le bruit de la mer, des vagues qui s'écrasent contre la falaise en soupirant, en rongeant de leurs larmes les pierres insensibles. Je reconnais le bruit de la mer Arctique, il y a des growlers qui cassent l'énergie mais ajoutent un souffle, une plainte, au son rugissant de la vague. Un vieux lion asthmatique, mais dont il faut encore se méfier.

Pourtant, je suis si loin de cette mer qui me ment. Elle dort encore sous sa banquise, c'est son rêve que j'entends. Elle veut la liberté, elle veut les oies, les eiders et les huards. Sedna peut-être qui appelle son amant, et ce chant d'amour me torture, m'éloigne de mon propre rêve, de ma marche tranquille dans la nuit noire et pourtant blanche du Nord.

Qui peut bien désirer un printemps? Qui veut briser le calme de la nuit? Ce soleil qui veut changer le monde, qui nous aspire par son énergie et nous veut plus que vivants, créateurs. Qui veut briser le rythme de la continuité et le remplacer par ce va-et-vient brutal ? Une mer qui me désire vague? Une vague qui veut s'accomplir par moi et me transformer dans ce mouvement jusqu'à ce je ne sois plus que sa danse dans son monde?

Suis-je victime d'une nouvelle Nulliarsak? Qui cherche à m'isoler de la continuité de la vie pour me prendre ma vie, me dévorer, me transporter dans cette vague jusqu'à ce que je désire frapper le rocher libérateur? Est-ce moi qui désire ce mouvement, me mettre dans la vague, dans la danse et que cela m'emporte jusqu'aux confins de ce monde?

Je m'oppose à l'espoir et crains le désir. Et pourtant, je ne peux nier que j'ai une grand printemps en moi. Que je dois faire les pas, que je dois avancer jusqu'au bout de cette aurore et réaliser la mer, voir et danser la danse de la vie.

Merci Otir, pour cette amorce du jeu du sablier du printemps démarrer par la Fée Kozlika. Je suis en retard oui, j'espère que tu me pardonneras.