Propos d'ours

Je n'ai plus l'habitude de travailler en entendant des sons humains autour de moi. Faut dire que je ne les ai jamais trop cherché. Le son humain que je connais le mieux, c'est après la lourde odeur de la peur, un immense Bang!, alors maintenant, quand je sens l'odeur de l'humain je préfère aller voir ailleurs.

Je préfére me fier à mon nez, je ne vois bien que sous l'eau, et encore, et j'entends encore mieux avec mes pattes qu'avec mes oreilles. La glace résonne de tout ce qui se passe, les 4 pattes bien ancrées, on entend tout sur des kilomètres à la ronde. Il y a bien sur la lente respiration de la mer, c'est une onde sur plusieurs minutes, régulière, puissante et paisible. Et puis il y a les grands craquements, la banquise ne dort jamais vraiment, des forces énormes s'opposent, le vent qui pousse sur des milliers de kilomètres et une ile quelque part qui bloque la rotation des glaces autour du pôle.

Et puis, il y a un béluga se casse un trou pour respirer, un phoque en profite quelques minutes après pour monter sur la glace... voilà mon repas qui se prépare, je n'ai plus qu'à y aller. Plus près de la rive, il y a aussi des lemmings qui font leurs tunnels dans la neige, n'essayer pas de les entendre avec les oreilles mais avec les pattes c'est très facile. Il y a aussi un cométique qui glisse, non il s'arrête, les chiens jappent, ça s'est pour mes oreilles. J'ai l'impression qu'un humain désire mon repas.

J'entends le vent, je le sens surtout. Cet humain est trop excité pour réussir sa chasse, trop pressé, il va faire fuir le phoque. Il ne faut pas aller vers le phoque parce qu'il sent aussi bien que moi le mouvement que le prédateur fait sur la glace, mieux peut-être parce qu'il n'a pas quatres pattes pour entendre mais tout son corps sur la glace. Alors on se place près du trou de respiration, et on attend, quand on entend son mouvement sous la glace, alors on se concentre, on contracte tout les muscles et on attend. Puis il y aura le petit bruit de l'eau lorsqu'il sort la tête. Un bond, un seul, et on plante les griffes dans la peau du phoque, et on le tire sur la glace. Voilà le repas est servi.

Il y a une lame de neige qui me sépare du chasseur. Je ne veux pas entendre son bruit, je préfère le sentir. Il est clair qu'il ne sait pas attendre. Je pourrais le contourner et attaquer par derrière, mais non les chiens l'avertiraient. Il est mieux que j'attende qu'il s'en aille. Ce ne sera pas long, il sent déjà la fébrilité.

J'ai le temps de dormir un peu quand même, la glace me le fera entendre quand il partira, alors j,irai chercher le phoque.

Un autre participation au sablier de Samandti...