Reprise du Dimanche: un message de Nokossa

L'an dernier à cette date, Nokossa descendait vers le Sud, ses premières grandes amours, suivit de 5 mâles empressés. Elle est revenue avec un bébé. Alors dans le message que je croyais adressé à quelqu'un, c'est peut-être d'elle-même dont elle parlait. Mais si cela résonne en vous, pourquoi ne pas croire qu'il est pour vous?

J’ai reçu hier un long message de Nokosa. Elle semble bien heureuse de descendre vers le sud. Son groupe, ils sont maintenant douze dont 2 jeunes femelles, a dû faire un large détour dans l’Atlantique pour éviter le golfe Stream assez fort et large cette année. Elle me dit surtout que l’amour c’est bien troublant. Cela devrait me faire sourire, mais non, le vieil ours trouve aussi que c’est bien troublant, que faire avec un sentiment pareil?

J’ai déjà parlé de la difficulté de traduire le langage baleine. Heureusement, les mégaptères (baleines à bosses comme Nokosa) aiment répéter souvent la même phrase, c’est leur façon de mettre de l’emphase sur l’idée qu’elles veulent transmettre.

Pokomkemol atoliteson wikumaci

Voilà ce que j’entends. Bien sûr, vous pouvez bien entendre autre chose. C’est comme ça que cela fonctionne le langage des baleines. Elles lancent dans l’eau des ondes ( des vagues même) d’émotion, quand vous entendez le message cela vibre (ou non) en vous et des mots apparaissent dans votre tête. Je ne sais pas si les mots appartiennent à la baleine ou à moi. Probablement à moi, parce que c’est l’émotion qui est vraiment signifiante.

Le premier mot est facile : Pokom, il s’agit d’un petit animal vif et très combatif, très difficile à voir, qu’on appelle en France la martre pêcheuse, et ici le Pékan, allez savoir pourquoi. Pokomkemol, c’est donc : ma petite martre, ma chère petite martre. Il faut quand même faire un peu attention. Nokosa ne parle pas nécessairement d’une martre, elle ne connaît pas beaucoup les animaux qui vivent sur terre. Elle parle donc d’une petite bête vive, nerveuse, un peu peureuse, secrète, pour laquelle elle a de l’affection. Peut-être sent-elle des ressemblances entre les deux.

Atoliteson : c’est plus complexe. Cela parle du vent, et du vent qui agite. J’aurais donc tendance à dire bourrasque ou rafale mais qui souffle sur vous. Elle vous atteint cette rafale et vous pousse à changer.

Wikumaci : je reconnais la racine de Wikuwam, la maison, le lieu de la femme, que les anglais ont traduit par wigwam, sans comprendre le nécessaire féminin de la chose. La maison comme le feu appartient à la femme, on n’y entre pas sans y être invité. La façon habituelle pour inviter un homme est d’allumer la petite lampe à la porte. Si l’homme accepte, il souffle la lampe et entre. Il y a aussi la racine de la joie dans ce mot :dans le contexte, la joie de la maison et d’être femme…

Alors, voilà mon interprétation : Réjouis-toi petite martre, accepte la bourrasque qui ouvre la porte de ta maison.

Zut! J’aimerais bien que ce message soit pour moi, mais je suis un ours, pas une ourse.