Il nous le dira

C'est le printemps. Je me tue à vous le dire et non! ne me laissez pas mourir, j'en ai eu une preuve formelle ce matin... Il y a le chien Platon qui...

Oui, il y a le chien Platon qui se pointe à 7 heures ce matin, tout frétillant et exigeant de sortir tout de suite. Je m'étonne un peu parce qu'il est plutôt pour la grasse matinée et c'est rare que je le voie avant 8:30. Comme il fait beau pourquoi pas.

Si tôt il fait déjà 5 degrés, ce sera une journée superbe. Et quel ciel! Rien à voir avec le bleu profond des hautes pressions de l'hiver, ni des blancs bleus des changements de temps, un bleu sans nuages, ou plutôt comme s'il y en avait qu'un seul extrèmement ténu, souvenir de nuage, rappel qu'il y a eu un hiver. Montréal a encore trop fêté. Le matin est très calme, presque sans trafic, mais l'absence de vent laisse un voile de pollution. Montréal a la voix rauque d'avoir trop fumé dans la nuit.

Un cri déchire ce bleu. Le chien bondit de terreur, le faucon glisse rapidement affirmant sa royauté sur ce monde, sur son monde. Le silence est tout de suite complet. On ne rouspète pas, on ne parle pas après le faucon. Ça prendra une bonne minute avant que ces bavards impénitents d'étourneaux sansonnets se permettent de commenter l'évènement.

Le couple de faucons pèlerins n'a pas migré. Il est comme toujours dans le clocher de l'église à coté. Les deux contrôlent la population de pigeons qui autrement exploserait. Ils sont magnifiques à voir ramené au gite, un pigeon qui fait presque la moitié de leur poids. Mais durant l'hiver, on ménage les forces, on ne se déplace que pas stricte nécessité et surtout on ne chante pas. Ça ne sert à rien d'affirmer une quelconque supériorité, c'est le froid le vrai maître.

De fait, les faucons réclament et huitent que lorsqu'il y a des oeufs ou des petits au nid. Alors si vous voulez la preuve que c'est le printemps la voilà:

Il glisse dans le ciel en surveillant son territoire, pour vérifier qu'aucun pillard de nids ne se trouve dans le secteur, et son cri impose sa terreur à tout ce qui vit. Parce que c'est le réel but du cri des oiseaux prédateurs, faire peur, et je vous jure que ça fonctionne.

Il vole sans chercher à surprendre, mais au contraire pour être vu, imposer sa présence, provoquer au combat sachant très bien que ce défi ne sera pas relevé. Il vole lentement la queue en éventail pour se freiner, un seul battement d'ailes tout les deux cents mètres, un seul battement si puissant qu'il lève l'oiseau de 30 centimètres. Une telle démonstration de force n'est que de la dissuasion. Mais tant que ça fonctionne, on a pas besoin de se battre.

N'en doutez plus c'est le printemps. Au fait, j'ai cherché dans tous mes dictionnaires, sans trouver le verbe huiter (le cri du faucon), avez-vous une piste?