Moi ! Une peluche!

Il parait que je suis un gros nounours! Moi! Une peluche... j'ai jamais été tant humilié. Le plus grand et le plus méchant des prédateurs sur terre, une peluche. Triste.

Remarquez, je n'ai rien contre les petits frères des maisons. J'ai déjà parlé du rôle de l'ours, de la voie du sauvage, comme il y a la voie du guerrier. Dans la voie du sauvage, il n'y a rien de l'exigence individuelle au dépassement de soi, à être au dessus, au contraire, il s'agit d'être dedans. Comprendre qu'il n'y a qu'une vie, une seule vie dont je ne suis qu'un grain temporaire, un petit nuage de poussière qui retournera très bientôt dans la continuité du sol. Le vent de la vie n'a pas conscience de mon existence, parce que le sens de la vie est de continuer, comme le vent. Voir, sentir, entendre et toucher. Etre là, patient. Les filles gardent souvent très longtemps leurs ours de maison. Histoire de pleurer dessus quand l'amant s'en va, et le lancer sur le mur parce qu'il prend trop de place dans le lit quand l'amant revient.

Mais quand même: Moi j'ai fait face au vent du Nord. J'ai marché dans la nuit sans fin, J'ai tué parce qu'il le fallait, pour maintenir l'équilibre. J'ai dansé, le nez dans les étoiles, au rythme de la pulsation de la vie, le rythme de la terre dont j'ai la garde.

Et comme j'en ai la garde, j'ai appris le chant des oiseaux et des ruisseaux, et vibré au grand choeur des baleines. Je suis l'ours, le plus fort donc le plus faible. Dans ma responsabilité, ce n'est pas la vie qui dépend de moi, mais moi qui dépend de la vie. J'ai besoin de plus de vie pour survivre.

Et oui, j'envie mon cousin de peluche dont la tâche est d'accompagner. Celui qui veut faire voir la vérité de la tendresse, plutôt que de cacher la vérité par la tendresse.