Thérolinguistique : problèmes de traduction

J'ai une discussion actuellement avec Pierre du bon blogue sur les dauphins sur le langage des mammifères marins. Je vais tenter de décrire les problèmes de traduction en thérolinguistique.

Avant de parler de traduction, il faut d'abord réfléchir à la notion de communication. Si j'écris : «je lui ai dit » c'est un mensonge, parce que ce que j'ai dit passe à travers un filtre culturel qui appartient à mon groupe et qui s'appelle «les interprétants». Le sens de ce que je dis est modulé par le sens commun de mon groupe, qui par rétroaction module ma façon de penser, de voir le monde. Descartes a tort, « je » pense peut-être, mais ma pensée est si intimement lié à celle de mon groupe, si bien que ce que « je » pense me définit par rapport à mon groupe et non pas par rapport à l'ensemble de la réalité. C'est pour cela qu'il y a tant de problèmes de traduction, il faut le « contexte culturel » et sans lui il n'y a pas de sens, mais contre-sens. Je sais j'ai déjà dit cela dans plusieurs billets  mais c'est important de le rappeler.

Dans le cas des épaulards et des dauphins, c'est encore plus complexe parce que le discours est continuellement partagé par le groupe, en image-mot  d'une complexité étonnante. Ces « image-mots » sont continuellement négociés dans le groupe et servent tant à définir l'espace autour d'eux que de l'action à tenir. Dans les jeux sexuels particulièrement complexes et raffinés des dauphins, ces « images-mots » deviennent frénétiques, et il faut avoir le oreilles de bois pour ne pas participer à ces vagues de plaisir.

A cause de la limitation résultant de l'invention du caractère ( du langage écrit) le cerveau de l'espèce humaine s'est progressivement limité à ne percevoir et ne donner du sens qu'à un faisceau extrêmement étroits de signes. L'extraordinaire largeur de la perception des épaulards nous restera inconcevable tant que nous n'aurons pas nous-mêmes dépassés le caractère comme mode de transmission de la connaissance aux générations suivantes. Et même alors cela prendra dix ou vingt générations avant de vraiment être habile avec la nouvelle forme de pensée. C'est la forêt qui est à l'origine de la pluie et non l'inverse.

Nous sommes tout près de a rupture avec le monde du caractère. Bientôt l'interface entre les neurones et le silicium  nous permettrons d'avoir accès directement à l'internet sans avoir besoin de passer par un clavier. Alors les humains se réapproprieront un mode de communication qui nous permettra de vraiment apprendre des oiseaux, des loups et des baleines.

Mais il faut éviter de se suicider avant.