Le mot "algonquin"

Pour Paumier une archéologie du mot "algonquin". C'est une reprise légèrement modifiée parce que je continue de chercher dans cette direction.

Mes grandes réflexions sur l'identité et l'étymologie intéressent moins mes lecteurs, c'est clair. Je me lance quand même dans l'explication d'un mot, parce que d'une part je me suis beaucoup amusé à cette longue recherche, et qu'aussi elle révèle beaucoup de ce que sont ceux de la forêt.

Le dictionnaire définit actuellement Algonquin, comme une « nation » amérindienne qui vit au centre du Québec, et comme une famille linguistique qui couvre la plupart du territoire de l'Amérique du Nord. Je me suis intéressé à la chose parce qu'il n'y a pas mention d'un tel peuple dans les récits amérindiens. Les gens de la foret, se nomme d'après la rivière où ils se déplacent.  D'où viennent-ils?

Comme dans toutes les recherches étymologiques, il y a une multitude de pistes possibles et ce sont les références à la culture qui nous permettent de faire des choix. Ainsi l'idée que cela pourrait venir d'une insulte Agné ( Iri Akoi), les mangeurs d'écorce, n'est qu'une réponse au mot: « Iroquois » qui est une insulte en algonquin ( Iri Akoi= les vrai serpent). La thèse voulant qu'ils soient des « algoumakin » mot des Listigouches (mais compris très largement) qui définit l'action (et l'acteur) de chasser le poisson au harpon. Ces thèses n'ont pas de support dans la culture.

Le mot « algonquin » est noté pour la première fois par Champlain au grand marché de Tadoussac, en 1603, où on célébrait une très récente et très importante victoire sur les Iri Akoi. En plus des jeunes et de quelques habiles négociateurs ( ceux qui sont habituellement au marché), il y a à ce moment-là de très grands chefs et guerriers. Champlain note Onondoto, (un des plus grands négociateurs du peuple Innu) et Bessouat qui est surement Tessouat le très grand stratège militaire et chef des Chissépipérini, le même qui 150 ans plus tard sauvera Montréal d'une attaque des anglais venus de Boston. Les héros de ceux de la forêt ne meurent pas, il arrive qu'ils changent de forme, mais ils ne meurent pas. Vous vous souvenez de Mahyénipigane?

Les deux groupes les plus nombreux sont certainement les Wolastoukii (les Malécites que Champlain appelle Etchemin, il y aurait une belle recherche à faire là-dessus) qui sont les animateurs de ce marché, et les Innus, surtout les Innus-Pessamites, (après tous on est chez eux), et les Innus-Ilnuash qui achètent de très grandes quantités de maïs, de pierres à tailler et d'herbes à boucaner, pour les revendre aux Cris et aux Inuit de la Baie d'Hudson.

Après les présentations premières, les hommes dansent la victoire. Cela durera au moins 30 heures, jusqu'à ce que la fatigue les fasse tomber. On assoit Champlain a la place d'honneur, entre deux puissantes mères de clan Wolastoukii. Ce n'est pas pour rien, ils sont des marchands, ils parlent déjà le basque et sans doute quelques mots de français. Quelques Innus connaissent aussi le français en 1603.

En regardant les danseurs Champlain demande : « qui sont-ils?» Si la dame près de lui avait compris, elle aurait probablement répondu : les Ab'naki, les alliés de l'Est. Mais elle a probablement confondu le « qui » du français avec le « Wen » : « que font-ils? » et elle aurait répondu: Algomo-ouik : Ils dansent vraiment très bien.

Dans le bruit des tambours, il est bien possible qu'elle ait dit : Al-k-cihq-mo-kin(owok): nos frères, nos alliés de (qui appartiennent à) la forêt. C'est ce que je préfère, et c'est pour cela que j'écris Alghonkin, quoi qu'en pense le petit Larousse.