Moukmouk de Pohenegamouk

Il est très rare de voir une cane ou canard colvert seul. Ce sont des animaux sociaux, avec des rapports complexes où la sexualité joue un rôle plus qu'évident. La plupart du temps on les voit trois par trois, deux femelles avec un mâle ou deux mâles avec une femelle, bien qu'on voit aussi assez fréquemment des couples de deux femelles. Les mâles vivant en groupe plus large à l'écart des femelles, c'est plus difficile de discerner s,ils sont à deux ou trois ou peut-être plus, je n'ai jamais assez observé pour en être sûr.

Ceux qui ont déjà cotoyé des Oies ou des canards domestiques ont probablement remarqué des comportements similaires. Cela semble la presque norme pour les oiseaux de la famille « Anas ». Alors quand j'ai vu la cane Anaïs seule, je me suis bien aperçu qu'il y avait un gros problème.

Il y a quelques jours, Charlotte est venue me présenter toute fière, son abondante nichée de dix petits. Dix wahou! Du beau travail... j'étais à la féliciter, mais j'avais quand même un doute. Anaïs qui trainait derrière a voulu s'approcher, mais a reçu des coups de bec. Hum, étrange pour des canes qu'on ne peut pas voir séparément depuis plus de 5 ans.

Il y a une hiérarchie chez les Colverts. Charlotte est certainement la dominante. Elle n,a pas accepté qu'Anaïs ait des œufs fécondés et pire qu'elle les couve jusqu'à terme... c'est son privilège. Alors au moment de l'éclosion des petits d'Anaïs, Charlotte a chassé son amie de façon a ce que les petits la reconnaissent comme mère. Et voilà comment Charlotte se retrouve avec dix petits, ce qui est plausible pour des canards en captivité, mais tout à fait exceptionnel dans la forêt.

Je crois bien qu'à la fin de l'été, quand les petits seront autonomes, les sentiments de Charlotte pour Anaïs reviendront et qu'elles seront de nouveau ensemble l'été prochain.

Tout ça simplement pour dire que ce que je vois autour de moi m'émerveille sans cesse. Tout ce que je pense loi, pratique usuelle ou comportement prédéfini, se retrouve souvent mis à mal par les faits.

Hier, profitant que le chien faisait une balade en canot ( pas seul, il ne pagaye pas très bien) j'ai eu une conversation avec Anaïs autour d'une tranche de pain sec (elle aime beaucoup), je ne parle pas assez colvert pour vous en faire une traduction nuancée, mais je sais reconnaître un cœur malheureux.