On ne touche pas au Polatouche!

Il fait vraiment trop beau pour faire semblant d’écrire. Et puis il faut que je prépare du bois de chauffage.

Je fais sécher depuis l’automne dernier quelques énormes bûches d’un bouleau qu’il faudra refendre si un jour je veux les brûler. Refendre, un sport que j’adore. Lever la très lourde hache et la faire redescendre avec le maximum de vélocité parce que vous vous souvenez F= ma. Chaque automne, deux ou trois semaines y sont consacrées. C’est le temps de m’y mettre. Fin octobre, je couperai les arbres pour l’an prochain.

 

Je sors côté lac. L’air est si bon, que c’est un plaisir de faire le tour de la ouache, pour tout voir. Quoi? Qu’est-ce que c’est? Dans le grand pin, à au moins 8 mètres au-dessus du sol, une tache blanche avance sur une branche. Et puis une petite tache grise tombe, non, plane depuis le pin vers l’érable...ça fait au moins 10 mètres et puis ça disparaît. J’ai vu un polatouche! Un écureuil volant. Il y en a semble-t-il beaucoup dans la forêt de la Belle Endormie… mais on ne les voit jamais. D’abord, ils vivent la nuit et évitent tant les yeux des hiboux que des buses, il faut être particulièrement habile pour réussir cela.

 

Vite, vite un petit tour dans la maison pour prendre les jumelles et j’inspecte l’arbre, rien. Il a disparu… j’entends un petit bruit dans le pin et j’espère y retrouver mon héros, non c’est la tache blanche qui appelle. Un miaou timide un peu misérable : Un chat! C’est un chat qui a réveillé et chassé le polatouche. Et voilà que cette canaille n’ose plus bouger. Il ne sait pas reculer, et avancer lui paraît trop risqué. Mon premier réflexe est de le laisser-là, à la nuit venue il fera un bon repas pour le hibou. Je te déteste sale couineur! Tu n’es même pas un vrai chasseur qui se cherche un repas, tu es tueur par jeu, allez saute et casse-toi la gueule c’est tout ce que tu mérites! Un autre miaou tout aussi misérable, un autre appel au secours comme si j’étais capable d’y résister.

 

Les ours ont le vertige et l’arbre casserait sous mon poids ( par sûr, mais je ne risquerai pas). Je vais donc chercher ma gaule d’émondage la plus longue, pas pour couper, mais pour plier la branche assez pour que le chat se trouve un chemin vers le bas. Ça fonctionne, enfin je ne sais pas si l’affreux pris de panique n’a pas décidé de sauter pour éviter mon grand bâton de torture. Et le voilà qui déboule tombant d’une branche à l’autre jusqu’au sol. Je fais tomber la gaule vers lui, presque certain de ne pas l’atteindre, mais assez pour lui expliquer qu’ici c’est une auberge pour les oiseaux donc strictement interdite aux chats!

 

Je ne veux plus jamais te revoir ici, et si tu reviens je te promets mon meilleur chaudron! Merci quand même de m’avoir permis de voir un polatouche.