Le jour sans régime

Le 6 mai, c'est la Journée Internationale Sans Régime. J'aimerais mieux que ça s'appelle la journée du plaisir de vivre, mais vivre sans régime, c'est déjà un départ vers une autre façon de voir le Monde.

Je ne crois pas faire une grande révélation en disant que je ne fais pas de régime. Je tente très modérément de surveiller mon poids, parce que j'ai autour de 30 kilos de trop, et surtout que mon tour de taille fait tout juste le mètre. À partir de là, les risques de diabète et de maladie cardiaque augmentent rapidement. J'aimerais peser un peu moins mais je ne sacrifierai pas mon plaisir de vivre pour être moins lourd. J'ai des priorités et ma masse corporelle n'en fait pas parti. Les magrets de canard si!

Je ne sais pas si la maladie alimentaire qui affecte le premier monde a pour cause le lien des individus avec le monde ou la pression que la société exerce sur les individus, probablement un mélange des deux, mais je pense qu'il y a là un début de solution. De fait, il y a aussi plusieurs troubles alimentaires. L'obésité des Américains pauvres ne se traite pas comme avec l'anorexie des jeunes filles trop bien. Ou peut-être dans les deux cas, il s'agit d'une tactique pour être enfin vu, d'avoir enfin une existence à soi, même si c'est une affirmation suicidaire. Souvent les jeunes anorexiques ont été des enfants modèles et au moment de l'adolescence, au moment où il faut s'affirmer, elles deviennent très conscientes qu'elles ne sont pas parfaites, qu'on ne peut pas être parfaite et qu'il faut faire disparaitre cette imperfection. Pour les jeunes américains des quartiers pauvres, il est évident qu'ils n'auront jamais accès à la vie telle qu'elle est montrée à la télé. De toute évidence, ça ne sert à rien de lutter, il n'y a pas de porte vers ce monde à l'intérieur de la télé. Par contre, on peut être heureux en mangeant comme on nous le propose à la télé.

La très belle et ronde Anouk

Tous les enfants de plus d'un an découvrent rapidement combien on peut faire suer les parents simplement en refusant d'avaler la foutue purée de carotte. Mao avait tort, le pouvoir n'est pas au bout du fusil, mais bien dans l'assiette. Je peux donc exister en affirmant que je mangerai ou pas. Il est d'ailleurs intéressant de noter le renversement entre la société de pénurie et la société d'abondance. Dans les communautés tribales d'Amérique, toute la nourriture est apportée à la mère de clan qui fait le partage. Tant qu'il y a relative abondance, ça va, mais en période de pénurie, il y a un avantage évident à être bien vu de la mère de clan sinon il n'y aura rien dans l'assiette. Nous passons donc d'une société où nous devons être bien vus pour manger, à une société où il ne faut pas manger pour être bien vu.

Oui, on peut être aimé avec 5 kilos de trop. Non les maigres ne sont pas nécessairement en santé. Il faut juste descendre de la chaise haute, et ne plus croire qu'on rendra heureux nos parents en mangeant, ou en ne mangeant pas. Ne serait-ce pas cela être adulte, se prendre tel qu'on est avec un tant que possible un grain de sel (et quelques épices) ?