L'identité
jeudi 13 juillet 2006, 02:34 General Lien permanent
Plusieurs billets portent sur le dégoût qu’inspirent les gestes du Nabot. Se saisir d’enfants dans les trains qui partent pour des colonies de vacances. Peut-on imaginer plus bas. Tout cela parce que certains sont français et d’autre non. Mais qu’est-ce que cela veut dire être Français, Québécois, Canadiens, Noirs, Amérindiens, Inuk? Avant le papier qui certifie l’identité, qu’est-ce que l’identité?
Il existe certainement des différences culturelles entre un Français et un Québécois. Mais où est la coupure? Est-ce que le plus Québécois des Français est plus Français que le plus Français des Québécois? Je ne crois pas. Même si chacun veut marquer sa différence, pour la plus part, ils veulent quand même être ensemble, aussi il y a facilement acceptation de l’autre dans ce qu’il est pareil et si différent. C’est vrai qu’une distance se crée quand l’autre ne veut pas « être ensemble », c’est extraordinairement difficile à définir ce qu’est l’acceptation ou le refus d’ « être ensemble ».
Ce que le Nabot fait, n’a rien à voir avec la présente réflexion. La France avait besoin d’esclaves pour accomplir les sales boulots, maintenant que cet esclavage est délocalisé hors de la vue des bonnes gens, on a plus besoin des esclaves locaux. Que cela fasse un an ou trois générations, le Nabot n’aura jamais la même identité qu’un esclave. Il veut rester esclavagiste.
Il existe aussi des différences biologiques. Le nomade de la forêt est biologiquement construit pour faire des repas de plus de 6000 calories, (certains jusqu’à 12000) et après passer 3 jours à ne boire que du thé. N’essayez pas vous n’êtes pas construit pour cela. Par contre, les Inuit ne peuvent se passer de manger durant plus de quelques heures, les gras rapides de la viande de phoque leur servant de combustible pour se protéger du froid, d’où leurs maigreurs extrêmes. C’est d’ailleurs de là que vient le terme péjoratif Eskimo : mangeur de viande crue. Le fait que maintenant il y ait des Inuit obèses et souffrant de diabète ne fait que confirmer ma thèse, nos aliments les tuent.
Pour le nomade de la forêt, le choix est clair. Ou il accepte de vivre dans des « réserves » une vie sans aucun sens, en rupture avec ses traditions, et disparaître victime d’alcoolisme, de désespoir, et de la violence qu’entraîne ce genre de vie. Ou bien d’être un mauvais indien qui vit dans la forêt qui refuse l’école à ses enfants, et qui empêche l’autre de développer un territoire qu’il a gagné à la guerre. Autant celui des réserves se voit refuser le droit d’être avec les blancs, autant celui de la forêt refuse radicalement d’être avec les blancs. Il reste à être un blanc comme les autres, et rejeter ce qui est le premier élément de sa culture : ne prendre que ce qu’il y a de « trop », ne jamais exploiter, ne jamais changer le monde à son profit. C’est dans un tel contexte que le racisme me semble inévitable.
Je ne peux pas être Inuk, la glace disparaît et c’est suicidaire. Je ne peux pas être amérindien parce que c’est dire qu’il y a au moins 4 milliards de personnes de trop sur cette petite terre. Je ne peux pas être de ceux qui détruisent cette planète à un rythme effréné. Je ne peux pas, je ne sais pas.
Être avec des papiers d’identité, c’est faire partie d’un groupe qui m’accepte comme membre de ce groupe à l’exclusion des autres. Comme je ne sais pas si les critères d’acceptation sont bons ou mauvais, je pense que c’est une raison suffisante pour refuser les papiers.
Moi, je ne sais pas, je ne sais rien. Je ne suis certainement pas dans le camp de ceux qui font descendre les enfants des trains parce que ça, je sais que c’est mal. Pour presque tout le reste, je veux refuser toute identité, parce que je ne sais pas ce qui est bien ou mal. Je veux simplement revendiquer d’être un enfant de la terre : il semble bien que cela soit déjà choisir mon camp.
Et pourtant je lutte, je te le jure, je lutte
Commentaires
Plus j'y pense à ce qui se passe dans mon pays, plus je sens monter la colère en moi.
Et plus je me sens impuissante...
C'est très beau ce que tu écris là et sincèrement, je ne sais pas quoi rajouter. Peut-être même que je ne rajouterai rien du tout tiens...
c'est magnifiquement bien exprimé ! je comprends et partage entièrement ta façon d'analyser l'identité !
J'aime pas le mot "racisme" parceque biologiquement il n'existe qu'une seule race : la race humaine. Et être humain c'est depuis toujours aller vers l'Autre. De tout temps, partout la rencontre avec l'AUtre a été une expérience fondamentale et universelle de notre espèce.
Malheureusement il y a toujours une partie de la population qui a peur, et plus il y a de la misère plus les gens ont peur. On peut revenir sur une discussion que tu avais eu aussi Moukmouk sur la peur pour mieux diriger un pays, je l'ai lu aussi dans la main gauche de la nuit que je viens juste de finir.
Je préfère rester optimiste, même si l'intolérence semble augmenter, je vois aussi une culture de plus en plus hétérogène, métissée s'étendre.
Mon avis perso, c'est que la solution ne consiste pas à vouloir absolument promouvoir l'égalité, la similitude. Mais au contraire mettre en avant que les différences existent et que c'est bien la différence ! mais ça aussi tu en parles très bien, ton exemple de différence entre les nomades de la foret et les inuits est très significatif. Accepter que l'un et l'autre puisse vivre différemment sans y porter de jugement, c'est, selon moi, la clef de la tolérence.
magnifique
il n'y a pas d'autres mots...
La lutte contre le racisme est longue et difficile. Le racisme n'est pas souvent une agression directe face aux gens. J'ai souvent croisé des blancs racistes contre les noirs (et les indiens aussi) mais j'ai aussi souvent croisé des noirs racistes. La métisse que je suis peux en témoigner.
Alors le seul moyen de lutter c'est bien de se déclarer enfant de la terre. De ne pas avoir de préjugé, de préserver son identité et de faire ce qu'on a à faire.
On peut aussi chanter et puisse que sur terre les hommes ont tous les même préoccupations, ben par exemple :
"Mélissa, métisse d'Ibiza
A des seins tout pointus
Dites jamais que je vous ai dit ça
Ou Mélissa me tue..."
Julien Clerc
TTo2--) tiens c'est une chanson que j'aime beaucoup. J'aimerais bien connaître celui qui n'est pas métisse. C'est la même question : est ce que le plus noir des blancs est moins noir que le plus blanc des noirs? est-ce qu'il y a une coupure? je dis non. Celui qui se dit pur est très impur dans sa tête.
Angel--) merci, j'essaie juste de comprendre
Nziem--) je veux revenir sur l'identité comme atavisme contre lequel il faut lutter, il faut que ça mijotte encore, c'est pas cuit.
Laflote--) un grand compliment d'une fille qui écrit si bien. J'ai hâte qu'on parle de féminité, une autre très belle question.
trollette--) ton pays ce n'est pas le nabot. Du moins il ne l'était pas, il y a toujours eu des fachos, mais il y a toujours eu plus de gens avec le coeur à la bonne place. le problème c'est qu'on entend beaucoup plus ceux de la première espèce actuelement, mais luttons, et surtout ne perdons pas espoir.
Il y a beaucoup de choses mélangées dans ton billet, Moukmouk... Que nous soyons tous des enfants de la Terre, on ne peut qu'être d'accord, et il est important de faire passer ce message, en rappelant la petitesse du regard qui exclut l'autre.
Sur les rapports de domination Nord-Sud, il y a une histoire qui n'a jamais été réglée, jamais été vraiment mise à plat en désignant les responsabilités. Mais pour autant, je ne suis pas sûre qu'il ait existé un "âge d'or" dans lequel des populations natives vivaient en paix et en union avec la Nature. Je crois que c'est une représentation très belle qui tient plutôt du rêve que de la réalité. Et c'est là que ça devient intéressant, aussi, parce que ton identité à toi, tu la fondes là-dessus, c'est ton droit à rêver ton identité...
Mais je suis dans ma campagne et je n'ai pas assez de connexion ni de fil rss pour discuter de tout ça jusqu'au bout de la nuit !
Grosses bises à toi, valeureux Ours Polaire.
Enfant de la terre, ouis ça sonne bien...
Puisque la Terre est vivante et notre mère à tous…
Non, non, je ne perds pas espoir, loin de là ! C'est juste que parfois je suis fatiguée, fatiguée par tout ça, l'impression que tout est toujours à reprendre depuis le début.
Je vais me remettre aux pinceaux, ça va me requinquer :o)
La réalité dépasse la fiction, dans le moche comme dans le beau, je vais m'appliquer à faire aussi beau que je peux et un peu plus, en espérant que la réalité nous le rendra au centuple :o)
Trollette--) va faire un tour au bord de la forêt, la livraison d'une centaine de moments intenses de beauté vient d'arriver.
Akynou--) Oui, il faut apprendre à devenir les enfants de la terre, c'est pas encore gagné mais j'ai espoir.
Samantdi--) J'ai cherché à comprendre où je pouvais laisser croire à un tel age d'or. On ne peut pas choisir de revenir en arrière, des catastrophes terribles pourraient nous amener là, mais je ne le souhaite certainement pas. je ne veux pas que les deux tiers de la population de la terre meure, et cet monde n'était pas l'age d'or, il n'y a pas d'age d'or, sinon dans nos voeux. Mais je comprends qu'il faut que je poursuive cette réflexion.
en tant que citoyen de la terre je mes sent parqué dans une reserve qui s'appelle France.........honte au nabot !!
merci moukmouk
"Une grande fille qui écrit si bien" : Ahhhhh ? Ben merci. Mais c'est surtout moi qui suis admirative de ta capacité à taper de longs billets avec tes "grosses" pa-pates toutes pwâlues... Dis, tu m'apprendras à attraper les saumons ???
citoyen du monde, present a l'appel!
Moi ce qui me chagrine c'est qu'on n'est pas Francais avant 18 ans quand on est ne en France de parents etrangers. C'est une loi tres tres injuste. Qu'on aie le droit de renvoyer dans un improbable ailleurs des petits qui n'ont rien connu d'autre que la France, ca me choque. Terre d'accueil, terre des libertes, regarde ce qui arrive a tes enfants...
C'est drole parcequ'en meme temps on n'a jamais ete autant de Francais a partir a l'etranger. Et franchement je croise les doigts pour ne pas avoir a revenir.
Les clans des rues les clandestins / Les cris des chiens hurlent à la ronde / J'suis pas inscrit sur la mappemonde / Y a pas d'pays pour les vauriens, les poètes et les baladins / Y a pas d'pays, si tu le veux, prends le mien... Que Paris est beau / Quand chantent les oiseaux / Que Paris est laid / Quand il se croit Français... (Les Têtes Raides & Noir Désir / L'iditenté)
Tu sais quoi... ? J'habite dans une rue qui s'appelle "rue des Grives" : c'est un signe, non ;-)))