Poème du Dimanche : La Marche à l'amour
dimanche 13 août 2006, 23:32 General Lien permanent
Je cherche le texte du jeune poète Alexis Lapointe : « Parasitaire » fichument difficile à trouver, mais totalement magnifique. Si quelqu’un a un indice… Pour ce dimanche la première partie d’un immense texte, tant par sa taille que sa beauté d’un immense poète pas connu en Europe et c’est bien dommage…
Gaston Miron, est le premier des poètes de la rupture. Un homme qui clame son amériquanité. Il reconnaît son statut de colonisé tant par les Anglais que par les Français et cherche à se construire en dehors de ces contraintes comme humain. Inutile de dire que cela me va droit au cœur.
« La Marche à l’amour » se veut la recherche d’une nouvelle Femme pour un Nouveau Monde. Espérant vous faire rêver un peu d’un amour tellement premier et différent qu’il sera un renouveau du monde…
Tu as les yeux pers des champs de rosées
tu as des yeux d'aventure et d'années-lumière
la douceur du fond des brises au mois de mai
dans les accompagnements de ma vie en friche
avec cette chaleur d'oiseau à ton corps craintif
moi qui suis charpente et beaucoup de fardoches
moi je fonce à vive allure et entêté d'avenir
la tête en bas comme un bison dans son destin
la blancheur des nénuphars s'élève jusqu'à ton cou
pour la conjuration de mes manitous maléfiques
moi qui ai des yeux où ciel et mer s'influencent
pour la réverbération de ta mort lointaine
avec cette tache errante de chevreuil que tu as
tu viendras tout ensoleillée d'existence
la bouche envahie par la fraîcheur des herbes
le corps mûri par les jardins oubliés
où tes seins sont devenus des envoûtements
tu te lèves, tu es l'aube dans mes bras
où tu changes comme les saisons
je te prendrai marcheur d'un pays d'haleine
à bout de misères et à bout de démesures
je veux te faire aimer la vie notre vie
t'aimer fou de racines à feuilles et grave
de jour en jour à travers nuits et gués
de moellons nos vertus silencieuses
je finirai bien par te rencontrer quelque part
bon dieu!
et contre tout ce qui me rend absent et douloureux
par le mince regard qui me reste au fond du froid
j'affirme ô mon amour que tu existes
je corrige notre vie
nous n'irons plus mourir de langueur
à des milles de distance dans nos rêves bourrasques
des filets de sang dans la soif craquelée de nos lèvres
les épaules baignées de vols de mouettes
non
j'irai te chercher nous vivrons sur la terre
la détresse n'est pas incurable qui fait de moi
une épave de dérision, un ballon d'indécence
un pitre aux larmes d'étincelles et de lésions profondes
frappe l'air et le feu de mes soifs
coule-moi dans tes mains de ciel de soie
la tête la première pour ne plus revenir
si ce n'est pour remonter debout à ton flanc
nouveau venu de l'amour du monde
constelle-moi de ton corps de voie lactée
même si j'ai fait de ma vie dans un plongeon
une sorte de marais, une espèce de rage noire
si je fus cabotin, concasseur de désespoir
j'ai quand même idée farouche
de t'aimer pour ta pureté
de t'aimer pour une tendresse que je n'ai pas connue
dans les giboulées d'étoiles de mon ciel
l'éclair s'épanouit dans ma chair
je passe les poings durs au vent
j'ai un coeur de mille chevaux-vapeur
j'ai un coeur comme la flamme d'une chandelle
( la suite plus tard) Gaston Miron (L'Homme Rapaillé, Montréal, l'Hexagone, 1994)
Commentaires
J'ai bêtement cherché le nom alexis Lapointe sur wikipédia et je suis tombée la dessus: fr.wikipedia.org/wiki/Ale... ... bon szang c'est tout bonnement incroayble :D
Elle est bien bonne celle-là... je connais un peu Alexis le Totteur, mais je ne savais pas que son nom de famille était Lapointe... Le poète lui a autour de 25 ans
hé moukmouk, pour faire ressortir des strophes (je ne sais pas si ce poème en a, mais la dernière fois ça t'avait embêté), essaie cette combinaison de touches :
- quand tu veux passer à la strophe suivante, tu appuies normalement sur "entrée"
- quand tu veux faire un simple "passer à la ligne", tu tiens la touche "majuscules" enfoncée quand tu appuies sur "entrée"
est-ce que ça marche ?
Oui ça marche, merci du conseil mais Lalette me l'avais déjà communiqué. J'ai du l'Utiliser pour celui-ci mais il n'a pas de strophe... Miron est un poète abondant, touffu, qui veut tout dire en même temps. Alors il ne s'embête pas de faire des séparations autrement que pour rendre le texte lisible ( en encore) c'est surtout quand on le déclame que ce type de poésie prend toute sa force. enfin pour moi... gueuler un peu de poésie ça nettoye les cordes vocales de toutes les bêtises qu'elles doivent raconter jour après jour. Non?
bien d'accord !
c'est vrai que c'est touffu, ça laisse perplexe au premier abord.
mais sans doute que déclamé, qui plus est par un ours, ça doit vous remuer les tripes comme il faut...