Le caribou englouti

Je réécris ce texte parce que... parce que. Mais pourquoi donner des nouvelles du Nord quand il y a tant de problèmes, c'est pas ça qui va payer l'hypothèque ni me faire trouver l'amour de ma vie...

Les caribous par dizaine de milliers se déplacent lentement dans la plaine sans arbre qui borde la mer Arctique. Il y a eu des montagnes ici, mais les glaciers les ont écrasé, il ne reste que des vallonnements doux comme des petits seins de jeunes femmes. Il n'y a pas un seul arbre aussi loin que porte le regard. Ici, c'est le pergélisol, sous la couche de quelques centimètres où poussent la mousse et l'herbe particulièrement abondante cette année, il y a des dizaines de mètres de glace mélangée au sol de moraine, la roche broyée aussi finement que de la farine par le frottement des glaciers.

Un caribou marche un peu à l'écart vers une touffe d'herbe qui semble bien appétissante. Tout à coup, il s'enfonce dans le sol, il se débat et veut nager ce qui ne fait qu'agrandir la flaque de boue autour de lui. On l'entend crier, appeler et puis plus rien, la tête s'est enfoncée, il est disparu. Les autres caribous ont fait semblant de ne pas entendre, n'ont eu que des tremblements nerveux comme pour chasser les moustiques trop abondants. Je pense qu'ils savent que ce danger est maintenant permanent, toujours le sol peut s'ouvrir sous leurs pattes et ils disparaissent sans aucun espoir de secours. Les caribous font semblant de ne pas savoir.

Notre petite planète vit l'année la plus chaude depuis que nous sommes capables de mesurer les températures. La forêt boréale brûle, le pergélisol fond à grande vitesse libérant des milliards de tonnes de méthane beaucoup plus actif que le co2 dans le développement de l'effet de serre. Le sol s'ouvre sous nos pas.

Il y a jamais eu aussi peu de glace pour couvrir l'océan Arctique. Cela aura des conséquences terribles sur la récolte des céréales... Pas de problèmes, on ira les chercher plus loin, les camions rouleront plus longtemps.