Un rêve m'est venu

Vous le savez, les soirs de Pleine Lune, les attrapeurs de rêves sont peu efficaces. Celui-là n'a rien de triste, mais il me trotte dans la tête. J'en parle pour me libérer.

Ce rêve m'est arrivé le premier mars, le soir où monsieur Lune éclairait la Terre. Mon attrapeur de rêves est très efficace, mais ce rêve-là était tellement puissant que son image s'est gravée en moi. Il faut que j'en parle, pour que tous ceux qui me lisent puissent en partager le poids.

C'est la grande forêt. Il y a un jeune homme qui marche dans la nuit d'hiver. Le ciel brille de beaucoup d'étoiles. Il est mince, souple et beau. Sans être fort, il n'a pas peur. Il a choisi la paix de la solitude, l'isolement pour construire dans sa tête un chemin de mots.

Il s'arrête pour regarder le détail d'une branche de sapin. Il s'émerveille de la Beauté du Monde, et cherche à la dire.

Pendant ce temps, j'entends très bien la voix de mon amie béluga Namiko.

J'entends les mots : Apcussé Kétagsouat Amiku... je sais bien que vous entendez sans doute autre chose, ça n'a pas d'importance. Les rêves ont leurs propres façons de nous entrer dans la tête. Le premier mot a pour racine « marcher », c'est facile de traduire par le marcheur. Kétagsouat par contre je n'ai aucune idée. Il a fallu que je demande à une vieille amie, j'ai peut-être entendu ce mot dans ma jeunesse, mais il n'en reste rien dans ma mémoire. Elle me répond que c'est le chemin d'étoile, la Voie Lactée. Amiku c'est l'idée de commencer, se mettre en mouvement. Je traduis donc par : «  le marcheur choisit le chemin des étoiles ».

Et puis j'apprends que ma cousine Bismarck a accouché d'un bébé cette nuit-là. J'en conclu donc que Namiko veut me dire, qu'il cherchera à s'isoler, mais qu'il sera poète ou scientifique, ce qui se ressemble beaucoup.