Un lendemain de drame
mardi 17 avril 2007, 19:54 General Lien permanent
Encore une tragédie dans une université américaine. On ressent le désarroi et une peine profonde. On glose de toutes manières sur les causes, armes, manque de surveillance, violences de cette société. Essayons d’y voir plus clair.
D’abord le taux de violence : il n’y a pas d’augmentation du nombre d’actes violents aux USA. Au contraire, ceux-ci diminuent chaque année. D’accord 48 000 morts violentes dont 30 000 par armes à feu, c’est encore énorme. c’est 100 fois plus qu’au Canada ( 10 fois plus par nombre de personnes), et 12 fois plus qu’en Europe. Et comme les USA est de loin le pays surveillé par la police et avec le plus grand nombre de prisonniers, cela démontre que la solution policière que propose la droite est carrément une source d’augmentation de la violence. Ce serait bon de le rappeler à ceux qui voteront Sarkosy. Et oui laisser les armes en vente libre comme c’est le cas aux USA favorise les dérapages, les actes fous, les désastres. Les contrôler ne réduirait pas à zéro le nombre de crime, mais au moins, réduirait le nombre d’incidents violents. Mais cela ne change rien aux causes de ce genre d’évènements.
C’est le genre d’école dans le genre de société où l’idéologie du gagnant, la théorie du plus fort, est le plus largement partagée. Il n’y a de place que pour les meilleurs. Et si tu ne fais plus partie des meilleurs, n’encombre pas la Terre de ton incompétence. Il faut les nettoyer au… choisissez le mot… que ce soit au napalm comme au Vietnam, avec des missiles comme en Iraq, ou avec une police répressive comme à Paris-Saint-Denis… L’important c’est de faire place nette de tous ces immigrants, ces gens d’ailleurs qui de toute façon ne pourront jamais s’intégrer. C’est biologiquement impossible.
Il faut retourner à la pensée des loups, le plus fort est le plus faible parce qu’il a la responsabilité des autres, sa survie en dépend.
Commentaires
Ton analyse me rappelle l'argument inattaquable contre la "perpétuité réelle" : il faut qu'un prisonnier, même coupable d'un crime horrible, conserve un espoir de sortir un jour. Sinon sa violence devient incontrôlable.
Et cet espoir ne doit pas être inatteignable : je ne pense pas que la solution pour les banlieues soit de prendre un jeune sur 100 000 et d'en faire un énarque, ni de leur faire miroiter d'être une star du foot ou de la chanson. Il vaudrait mieux qu'ils aient deux chances sur trois, ou plus, d'avoir un boulot intéressant, un appartement à eux, une place reconnue dans la société.
D'autant que la majeure partie des gens a plus besoin d'un bon boulanger que d'un PDG de multinationale.
Oui, tu fais bien de dire que les choses sont compliquées. En même temps, quand quelqu'un a commencé à se sentir en danger , et à s'armer , c'est difficile de le faire revenir en arrière.
Sarko dit que c'est au Karcher qu'on nettoie la racaille des quartiers. Les armes ne sont pas en vente libre au Canada. J'avais cru entendre ça. L'argument était de dire qu'au Canada les armes sont libres et ça ne les rend pas violent pour autant. Ici dans ma région, les armes de chasse sont une tradition de père en fils voir même de grand-père en petit fils. Et bien sur il ya des accidents. Tout recemment avec un gamin de 5 ans.
TTo2--) je vais t'avouer que j'ai fait le tour parce que je ne sais pas vraiment ce que c'est, et je ne voulais pas écrire une bêtise. C'est devenu aussez compliqué d'acheter une arme ici, et c'est tant mieux. L'argument que ce ne sont pas les armes qui tuent mais ceux qui les manipulent, je veux bien, mais moins il y aura d'armes en circulation, moins il y aura de crises de folie où on tue autour de soi.
Justine--) Rine ne pourra faire qu'il n'y a plus aucun crime violent. Mais ça doit pas nous empêcher d'essayer.
Lune--) je ne connaissais pas cette formulation de l'arguement, mais c'est ce que j'essayais de dire.
Et c'est cette conception de l'humanité que l'on veut nous imposer partout dans le monde ? Le western quotidien, la raison du plus fort victorieuse de la morale et l'argent vite gagné ? Sans parler de la sélection génétique à laquelle Sarkozy nous conduira si nous le laissons faire. Merci Moukmouk de faire le lien avec les enjeux politiques en France. C'est bien des mêmes responsables qu'il s'agit.
Je trouve ça un poil faux-derche, le discours "Ce ne sont pas les armes qui tuent, ce sont ceux qui s'en servent". Parce que la finalité d'une arme, quand on la fabrique, c'est bien de tuer, quand même ?... Qu'est-ce qu'on peut faire d'autre avec une arme ? Se défendre ? C'est à dire "Menacer de tuer"...
Ça fait que 2 options, en fait... bon, à la rigueur, on peut ajouter "tirer sur une cible en carton".
Allez, ça fait 3.
Avec un couteau aussi, on peut tuer, mais on peut aussi éplucher des légumes, couper la nourriture, de la ficelle, du papier, nettoyer des merdouilles entre les touches de clavier, dévisser des trucs. Donc, la finalité d'un couteau, même si c'est aussi une arme, c'est quand même vachement plus varié, d'autant qu'on aurait du mal à tuer 32 personnes avec, dans les mêmes conditions.
Mais bon, peut-être que j'ai pas tout compris.
Kärcher, c'est une marque qui vend des nettoyeurs (jets d'eau) haute pression pour nettoyer toutes sortes de souillures qui s'incrustent.
Bonjour Moukmouk.
Je sors un bref instant de ma quarantitude pour te faire un petit signe d'amitié à travers l'Atlantique. Et pour commenter ce billet brièvement.
Ton idée centrale est, si j'ai compris, que seule la société de la gagne est fautive dans ce drame. Le mot "fautive" est très mal choisi, mais bon, j'ai dit que je serai bref. Derrière tout l'enchaînement légitime des responsabilités empilées de la fabrication d'armes à sa vente libre, en passant par un psychisme anéanti et une arrogance écolière un peu trop visible probablement, c'est bien cette idée du gagneur super vainqueur, mise en avant par nos plus dangereux postulants, qui conduit à ces actes qu'aux temps anciens on qualifiait étourdiment de nihilistes.
Il convient comme toujours, à partir du chaud de l'émotion provoquée par le massacre, de tenter de réfléchir à la société, à la façon de constituer une société ou de modifier celle où nous sommes, puisque seule la vie en société nous permet, à nous pauvres humains, de survivre dans la nature. Et il me vient un intitulé qu'un jour je mettrai en titre d'une de mes élucubrations, histoire de provoquer l'ire du lecteur distrait:
Pour une société de médiocres.
Voilà. Je ramasse les copies dans deux heures, histoire de plagier ensuite les pensées de tous et d'en faire mon miel.
Mais tu n'es pas obligé de répondre; il faudra alors que je me débrouille seul avec cette idée bon sang qu'elle me plaît.
Oui alors là, je te suis pas vraiment.
Tu dis:
- quand les armes sont en vente libres, il y a plus de mort MAIS les armes en vente libre ne sont pas la cause.
- quand il y a plus de répression policière, il y a plus de mort C'EST FORCEMENT la cause.
Pas un peu arbitraire comme choix causal?
Si on va par là, on pourrait aussi déduire du fait qu'il y a plus d'obésité aux Etats Unis, ET plus de morts violentes DONC la malbouffe est une cause de violence.
Comment tu sais que la répression policière joue un rôle causal, et comment tu sais que ce rôle causal est prédominant par rapport au rôle causal de la vente libre des armes?
Je te concède que que Sarkozy a un programme détestable, mais je trouve que ce raccourci aurait pu être employé par lui.
Ca m'a tellement fait sursauté que j'ai du mal à lire la suite de ton billet.
Drenka--) est-ce que je fais des liens "causals" je ne lis pas le billet comme ça. Je ne pense pas que c'est "à cause" de ceci ou cela. Ça m'apparait plus complexe qu'un cheminement de causes.
Andrem--) Médiocre non, solidaire oui. C'est l'idée que seul on s'en sort, et qu'on s'en sort en écrasant les autres. Il y a des "gagnants" et c'est une université de "gagnants", les perdants ont torts et seront écrasés. Je suis du coté du grand nombre donc des perdants.
PrincessH--) C'est l'argument en vogue aux USA, il est stupide mais on se le fait répéter continuellement.
Oxygène--) Ça me semble assez évident.
Vendredi soir, devant mes fenêtres, j'ai vu deux bandes rivales de jeunes gens se taper dessus joyeusement à coup de battes de base-ball. S'ils avaient eu des armes, la bagarre aurait tourné en massacre. Samedi, c'est un quad qui est venu faire des acrobaties sur la place où je vis, sans souci des gosses qui y jouaient (sans parler des voitures qui ont tendance à prendre le lieu pour un circuit de formule 1). Je n'évoquerai pas les déprédations à répétition des abris de bus, bulles à verres, cabines téléphoniques, etc. Les habitants, excédés, ont appelé la police qui a été accueillie par des jets de projectiles divers. En guise de représailles, dimanche soir, une voiture et plusieurs habitations ont failli partir en fumée. La voiture est cramée mais heureusement, les bâtiments (tout neufs!) n'ont été que partiellement endommagés. Plus de peur que de mal, ouf !
Conclusions d'après un vécu "tout chaud" : si la vente d'arme était libre, il y aurait eu plusieurs massacres en trois jours, autant de la part des jeunes qui semblent vouloir imposer leur loi sur ce qu'ils considèrent comme leur territoire, que de la part des riverains dont certains ne sont pas loin de péter une case. La violence appelle la violence, et provoque des réactions en chaîne. La police, quand elle intervient, ne fait que réprimer et ne résoud rien, elle fait son boulot, point barre. Les travailleurs sociaux, les éducateurs, sont dépassés et chaque jour tentent de trouver des alternatives pour canaliser la délinquance. Bien sûr tous les jeunes ne sont pas des voyous mais ils sont tous solidaires et il suffit de deux ou trois meneurs pour mettre la pagaille dans un quartier.
Donc, oui, je rejoins Andrem quad il parle d'une société de médiocres. Ou de primaires, c'est pareil. Quelle est la solution ? Certainement pas le Karcher...
La MAUVAISE FOI!!!
"cela démontre que la solution policière que propose la droite est carrément une source d’augmentation de la violence"
Si c'est pas un lien causal, me demande comment tu le lis hein.
Je sens que je n'ai pas assez dévoilé ma question. Je précise donc, je suis souvent si caché derrière mes discours que mon idée même a disparu dans celui-ci, et que je ne retrouve pas mes petits.
Je voudrais plaider pour une société de médiocres. Je m'intéresse à cette idée.
On nous bassine du mot d'excellence, on nous vante la réussite, la gagne, la domination, comme seule valeur constitutive d'un monde où vivre; le résultat est trop visible, et point besoin d'y voir un rapport, comment dites-vous là-haut, causal, voilà, causal. Point besoin de le détailler, chacun le sent bien, que cette divinisation de la réussite individuelle est l'origine des maux. Un commentaire est trop bref pour développer, voilà pourquoi ce projet me tente d'aller y voir de plus près.
Mais les conséquence de ce Sarkozysme, je le nomme ainsi puisqu'il s'en est fait le héraut officiel, je n'invente aucun procès d'intention, il le dit et le proclame, est la violence qui traverse toutes les faces de la société, qu'on soit dans les salons dorés de la République, dans les antichambres des grands puissants multinationaux, dans les arcanes des universités et des laboratoires feutrés, dans les ruelles des banlieues en noir et blanc façon Marcel Carné ou Leo Mallet, dans ce qui reste de pelouse des cités, qui furent radeuses un bref instant au début des années soixante.
Cette violence est contenue dans la compétition individuelle, et, fondamentalement, détruit l'idée même de société. Rien n'est durable au nom de ce principe de la suprématie de l'individu, au nom de la victoire de celui-ci sur le monde, puisque le monde en question est lui aussi constitué d'individus, et que l'individu victorieux, par définition, supprime l'individu perdant, le nie, le jette aux ténèbres extérieures où ne sont que pleurs et grincements de dents, paradoxe pour l'extérieur.
Le médiocre est celui qui ne combat pas contre l'autre. Le médiocre est celui qui mène sa barque au mieux, en contournant les obstacles, en sortant de l'eau au passage et sans rien dire celui qui se noie, en demandant de l'aide s'il est en difficulté, le médiocre ne veut pas la victoire, ne veut pas gagner, ne veut pas écraser. Il ne roule pas des mécaniques, il ne brandit pas sa batte de baisebôle, il ne pose pas sa peau de banane devant la porte du Khalife, il tente juste un peu de vivre.
Oui, je le nomme médiocre, et je m'en vante. Parce qu'il ne cherche pas à dépasser de la tête, parce que l'air des cimes l'asphyxie, parce qu'il se cache si l'on crie, parce qu'il est couleur muraille, parce que chaque matin il va to-boulo dans sa petite auto qui crache du CO2 dans la couche d'ozone, et qu'il fait sans bruit son travail pendant 8 heures en comptant soigneusement les ARTT qui l'attendent, parce qu'il aime sa femme et sa fille sans trop le montrer à cause de l'air des cimes, parce qu'il reconnaît les faits quand un agent lui reproche d'avoir brûlé un feu rouge alors qu'il sait très bien ne pas l'avoir fait mais il n'a rien pour le prouver, l'agent non plus mais c'est lui qui gagne, justement, l'agent doit avoir son quota de la journée, parce que face au gagnant armé jusqu'au dents il ne lui reste plus qu'à prier que le gagnant soit maladroit ou que l'arme s'enraye, sinon il meurt sans laisser de trace.
Je suis ce médiocre, ou du moins je m'y essaie, et vous ne pouvez pas savoir comme c'est difficile. Je suis sûr qu'une civilisation de médiocres pourra durer des millémaires, enfin.
Un jour, dans un de mes blogues, j'écrirai là-dessus. J'ai peut-être déjà commencé, sans le avoir, sans le vouloir.