Encore la voile
dimanche 8 juillet 2007, 17:20 General Lien permanent
Grosse fin de semaine de course de voile. Pas le temps de faire de billet. Mais ça vous donne le droit à une reprise de ce que je pense un de mes plus beaux billets. J'espère que vous l'aimerez.
L’avantage de vivre sur le bord d’un lac, c’est que quand j’en ai ma claque de travailler, je descends, je hisse les voiles et en moins de 3 minutes, je glisse sur le lac. Vous êtes jaloux? J’espère. Vous pouvez aller au cinéma quand vous voulez. Moi je danse quand je veux.
Je suis presque sûr que c’est la grande Chorégraphe Pina Bausch que la beauté de la danse était dans le risque de tomber. Tout est question d’équilibre, mais la beauté est sur le fin fil du rapport dans l’espace.
Un petit dériveur (un 420 pour ceux qui aiment) c’est un tas de bouts de corde, du tissu accroché à une perche sur un petit truc en plastique. Quand on le met à l’eau, c’est gauche et pataud comme un albatros, ses ailes sont beaucoup trop grandes pour son petit corps, ça se dandine sans pouvoir choisir une direction. Puis on tend un peu, et ça commence à vivre. On ne tend pas tellement les bouts que vers un objectif, trouver l’équilibre, le bon rapport entre le vent, la forme, la masse, la lumière, le goût, la vitesse, le plaisir, la musique que l’on cherche.
Maintenant on vise. On cherche un cap comme on choisit un rythme de danse, est-ce que je veux faire du largue, de la valse, du près, du tango, où si j’improvise, je cherche seulement à voler. Je choisirai de voler.
Le bateau est d’accord, il aime planer. Alors, on s’accroche, on s’accorde, on se lie. On respire ensemble en cherchant une vague, et puis quand nous sommes en accord, l’étrave se lève vers le ciel et la grande glissade commence. Pas de mouvement brusque, tout peut nous faire tomber. Mais il est évident qu’on vole, il est évident au silence devant qu’on ne touche plus l’eau, et puis le bateau chante. La dérive dans son puits vibre et cela fait un son grave qu’on sent dans tout le corps. Et puis la note monte, le bateau crie, s’époumone à dire sa joie.
Soyons francs. Au poids de la bête (moi) l’arrière du bateau reste à l’eau. Ce n’est pas de sa faute, mais je suis vraiment trop lourd pour ses petites ailes. Ne lui dites pas, il a tous les courages et espère encore m’amener au-delà du ciel.
Une risée vient. On lâche un peu les bouts, le bateau se penche quand même, je monte vite au rappel, trop lourd je tends un peu trop et tout se transforme en vitesse, la gite est extrême. C’est le moment magique où on doit tomber mais qu’on traversera parce qu’il n’est pas beau de tomber. Alors, on ira plus vite, l’effort sera encore plus grand, mais sans que cela paraisse parce que seule la grâce est jolie.
Équilibre, tension et souplesse c’est ça la danse, c’est ça la voile. On a pas à rester des heures sur ce plancher de danse qui bouge beaucoup. Très vite, tous nos muscles réclament une pause, c’est le temps de virer.
On est pas en course, alors je me permets une petite pause le nez dans le vent. On calme le cœur et le souffle, un tire un peu sur les bouts et c’est reparti. Un aller-retour par le travers du lac me suffit, 6 kilomètres, de cette tension c’est assez pour revenir à ma table avec un esprit neuf, et un grand sourire dans tout le corps.
Commentaires
oui je t'envie à pouvoir ainsi te libérer. Quelle jolie balade en mer.
La mer me fait peur et pourtant j'ai l'impression de voler moi aussi, de ressentir les sensations quand le bateau vole au vent, surtout les sons et les vibrations. Merveilleux. Beau billet que celui-là. Merci ^_^
Ah oui, tu as raison, c'est un de tes plus beaux billets. Sans doute celui qui me fait le plus rêver... Merci pour ce petit voyage en bateau. Dis donc, ne va pas si vite ! Mais quoi, tu vires sans prévenir ? Attends, je ne suis pas ... Plouf !
Ha oui.. je me souviens que ce billet là m'avais beaucoup émue.. je le relis avec grand plaisir
Je ne comprends pas comment j'ai pu râter ce billet alors que la pratique du 420 avec un ours (du même cru que toi, qui plus est, vous avez quelques jours de différence) a été mon quotidien vacancier pendant des années ??!!!
Ah Oui qu'il est magnifique ce billet et si je ne l'avais pas oublié j'ai encore plus de plaisir à le lire
Moi aussi, je découvre, esbaudie, ce joli billet, qui me propulse sur les berges de mon lac à moi (enfin à moi... vu que c'est le plus grand d'Europe, je l'partage quand même avec quelques autres personnes ;-), à tirer sur les ficelles de notre 470 (suis plus p'tite que toi, mais mon bateau, il est plus gros...là...) En même temps, maintenat, j'ai changé de dimension et je me suis mise à l'eau salée...c'est pas le même monde, pas les mêmes couleurs/dimensions, mais les émotions restent identiques....
PS: franchement certaines questions du captcha donnent juste envie de répondre à côté pour rigoler...le coup du cheval blanc.... ben euh...noir, pourquoi?