Moukmouk de Pohenegamouk

La riche province de Santa-Cruz tient aujourd'hui dimanche un référendum pour s'attribuer une large autonomie politique et le contrôle des richesses naturelles du territoire. A première vue, c'est une bataille pour le contrôle du gaz naturel. Mais comme toujours, il est important de faire un court historique pour mieux comprendre.

La Bolivie est un de ces pays qui a connu une dictature militaire pro-américaine qui a étranglé financièrement le pays. S'en est suivi une période de contrôle par des partis politiques blancs et dominés par les USA qui n'avaient de but que de se plier aux dictats du FMI et de la Banque Mondiale et bradant toutes les ressources du pays contre des miettes servant à enrichir la classe dominante. La vaste majorité de la population est de culture Quechua, et n'a aucune possibilité d'intervenir dans le débat politique.

Et puis c'est la bataille de l'eau. La fourniture de l'eau aux villes et villages a été vendue à des transnationales qui appliquent très fermement leurs monopole sur la ressource. La majorité amérindienne n'a pas d'argent et n'a donc pas accès à l'eau. Village par village, il y a eu une grande bataille pour la reconquête de l'eau, avec comme conséquence la loi des groupes citoyens promulguée en 2004 et qui autorisera les groupes de citoyens à présenter des candidats aux élections. Le monopole des partis politiques est brisé.

Aussi la victoire d'Evo Morales en 2005, n'est que la concrétisation du pouvoir démocratique qui a été gagné village par village dans presque tout le pays. Il y a renationalisation des ressources du pays, et surtout l'organisation de services (très minimaux) pour tous les citoyens. Presque partout sauf dans la région de Santa Cruz, où se fait principalement l'exploitation gazière, où sont les techniciens blancs, les civilisés, les riches instruits.

Maintenant l'armée et la police est sur place et tentera d'éviter qu'éclatent des violences à Santa-Cruz. Mais on sait que de grandes quantités d'armes sont arrivées récemment dans le pays, et que les armées privées des riches agriculteurs sont de nouveau tout à fait opérationnelles. Les populations pauvres des villes appuient le gouvernement Morales, mais ils ne sont pas de taille à défendre une démocratie qui n'a jamais vraiment existé dans cette région.

Un joueur a totalement été ignoré dans cette bataille. La plaine de Santa-Cruz c'est l'Amazonie. Il y a dans cette forêt des humains. Des humains qu'on n'a jamais compté, qui n'ont jamais compté et qui maintenant voudront prendre part au débat. Ils ne sont ni des blancs ni des Quechuas. C'est leurs forêts qu'on massacre pour faire des plantations, qu'on incendie parce qu'elles nuisent à l'exploitation gazière.

Je ne sais pas si c'est là que commence la troisième guerre mondiale. Mais cette guerre des riches blancs contre une marée de pauvres, les pays du Nord la cherchent depuis longtemps.