VoldeMort!

Non, je ne parlerai pas du sorcier à lunette, mais du plus féroce prédateur du ciel.

Montréal peut s'enorgueillir de loger plusieurs couples de faucons pèlerins nicheurs. Pour sûr, j'en connais trois, et c'est déjà plusieurs quand on sait comment ces oiseaux sont rares et fragiles.

70 kilomètres-heure en vol continu, 300 kilomètres-heure en piqué. J'aimerais bien qu'un physiciens ou un kino quelque chose, calcule la pression sur les ailes de l'oiseau, quand après ces piqués extrêmes, le faucon ouvre les ailes au dessus de sa proie... essayez de sortir une tôle rigide d'un demi-mètre carré de la fenêtre d'une auto lancée à 100 KM/h. La puissance et la résistance de l'épaule du faucon pèlerin dépassent tout ce qu'on connait sur la résistance des matériaux. Enfin tout ce que je connais...

Depuis trois jours, les cris d'un couple de faucons déchirent le ciel de mon quartier. C'est un cri inimitable, conçu pour inspirer la terreur, pour glacer l'ennemi, le figer pour en faire une proie.

J'ai pris des tas de photos, mais voir une petite tache grise le long d'un tronc gris, ou une ombre sombre qui raye le ciel ne nous apprend rien. Je sais qu'ils sont là parce que je les entends, et que je frissonne à chaque fois, sentant la mort qui rôde. Je n'ai pas peur pour moi, je suis trop gros même pour un aigle. Mais je ressens la même hantise que les oiseaux de savoir VoldeMort dans le ciel.

Les faucons sont pèlerins ( dans le sens de vagabond) parce qu'ils sont de très grands voyageurs. Les deux qui ont dormi dans l'arbre face à la maison, ne sont pas des Montréalais. Ils sont plus petits et ont le ventre plus blanc que ceux qui nichent dans les grands édifices du centre-ville. Ce sont deux de la sous-espèce Tundrius, des faucons du Grand-Nord, qui reviennent d'un hiver passé dans les falaises du Mexique ou plus au sud et qui retournent chez eux en suivant les oies, et les autres migrateurs. Tous ces voyageurs attendent que ça dégèle un peu plus là-haut.

Ces si beaux et si puissants oiseaux nous rappellent la grande loi: le plus fort est le plus fragile, le plus puissant prédateur est au service de sa proie. Quand l'ours ne mange pas les phoques, la population de phoques explosent et le manque de nourriture les affaiblit, jusqu'à ce qu'une épidémie les décime et l'ours mourra de faim.