Plouf!

Je ne parle pas beaucoup de voile cette année, il y a de bonnes raisons.

Il y a quelques jours, il vente, mais il vente... on a déjà vu plus chaud, mais j'ai franchement le goût de mettre les voiles et d'aller jouer au plus fin avec ce vent-là. L'automne, il y a des vents très puissants, mais ils sont réguliers, il est possible de s'en accommoder plus facilement que les vents d'été souvent tourbillonnant. Mais ce n'est pas une raison, il y a un défi et je le relève.

Le petit voilier a cessé son dandinement habituel. Il trouve que la vague fait plus que le bercer, ça devient du trampoline. J'ai un peu de difficulté à lui mettre ses ailes. C'est comme un cheval de course tout content qu'on le harnache, il sent qu'enfin il va pouvoir s'éclater, donner le maximum, montrer à ce cavalier téméraire, que peut importe le terrain, il saura.

Il suffit de border un peu et ça part. Un près bon plein lui convient parfaitement, remonter la vague, il aime ça, ça lui permet d'écrêter les cimes, briller parmi l'écume, avant de plonger vers la prochaine vague. Quand même, les plongeons ne sont pas très profonds et à peine le nez a un peu descendu qu'il recommence à grimper. C'est bien, c'est rapide, l'équipage est heureux.

Il est temps d'ouvrir, de débrider un peu, d'ouvrir vers le largue pour atteindre le maximum de vitesse. La réaction est immédiate, il veut labourer ce lac et ouvre un sillon blanc dans ce bleu qui grisonne dans les risées. Ça file, mais ça fiiiiiile...

Tout à coup je ne sens plus de pression sur le gouvernail, je me suis envolé... je jette un œil catastrophe, le bateau allait tellement vite que la pression verticale sur le safran à fait sortir le gouvernail de ses gonds... Plus de bride, mon petit cheval blanc devient fou et me désarçonne. Plouf! Me voilà en bien fâcheuse posture. Je suis trop habillé et mes vêtements mouillés sont lourds à trainer. Comment vais-je faire pour remettre ce bateau debout ?

Par chance, il y a plusieurs bateaux sur le lac et rapidement on vient à mon secours. Première opération, ramasser ce qui flotte. Le gouvernail, la pagaie, et puis un très courageux jeune homme plonge et vient m'aider à remettre le bateau sur sa quille. Merci, merci... là, je devrais normalement remonter à bord. Mon jeans et mon gilet de laine mouillé me donnent l'impression de peser des tonnes. Et puis de toute façon pas de gouvernail, comment ferais-je pour rejoindre la plage ?

Une moto-marine s'offre gentiment de me tracter, il n'a pas d'hélice et peut se rapprocher à toucher la rive. Plutôt que de tenter d'embarquer et de faire chavirer de nouveau le petit bateau sous mon énorme poids, je m'accroche au tableau arrière et me laisse tirer jusqu'à la rive. Merci, merci, merci.

Maintenant, j'ai encore un gros problème. Le bateau qui a ramassé mon gouvernail est reparti... J'ai eu beau faire le tour du lac, je ne le trouve pas. Un voilier pas de gouvernail, ça ne sert strictement à rien. Un gouvernail neuf, c'est plus de quatre cents dollars et deux semaines de livraison... Mon espoir c'est que le bateau revienne en fin de semaine prochaine, et je vous jure que je lui fais une belle récompense. Sinon, avez-vous un gouvernail de dériveur à vendre ?