Resolution No 1: Défendre l’école

La saison des résolutions commence. Les trucs comme faire un régime, je les laisse à ceux qui n’ont pas l’intention de tenir leurs résolutions. Plusieurs ne veulent pas en faire en disant que c’est inutile. Pourtant, changer le monde commence par décider de changer quelque chose. Je veux défendre les jeunes, leur donner espoir et je pense que ça commence par une défense de l’école.

Vous avez tous vu la petite présentation sur l’école publique, où on voit en 1950 une école extrêmement exigeante, et qui se dégrade de plus en plus jusqu’à ne plus que souligner des mots dans une phrase. Vous entendez et peut-être répétez aussi le discours du monde terrible qui attend les jeunes. Un monde où ils n’auront pas de place, où il n’y a plus d’emploi, plus d’avenir, plus de vie.

Je sais moins pour l’Europe, mais ici, les entreprises ont un énorme problème d’embauche. Il n’y a tout simplement pas assez de jeunes qualifiés pour remplir les postes qui s’ouvrent. Elles doivent aussi s’adapter à cette jeunesse qui a des exigences nouvelles, refuse d’être dominé et pratiquement esclave comme leurs parents et pour qui la vie en dehors du travail existe. Il y a du chômage bien sûr, parce qu’il est impossible de trouver un travail adapté pour tout le monde, tout de suite. Mais il y a aussi énormément de postes à combler.

C’est vrai que l’école a changé au moins autant que la société. En 1950, l’école publique éliminait jusqu’à 80% des jeunes parce qu’on avait besoin de mains-d'œuvre dociles dans les usines. Il était important d’avoir une école qui sélectionnait et choisissait qui allait dominer et qui serait dominé.

On a exporté l’esclavage ailleurs, et maintenant nous avons besoin de jeunes qui ont des compétences, qui ne veulent pas seulement exécuter les ordres, mais découvrir, développer, inventer. Alors, il n’est pas question d’éliminer un jeune de 15 ans sous prétexte qu’il a des difficultés dans sa famille, qu’il n’a pas découvert le plaisir d’apprendre, qu’il ne trouve pas pour l’instant la force en lui pour avancer.

C’est vrai que les défis qu’affronteront ces jeunes sont immenses. Avec la planète qu’on leur laisse, ils ont intérêt à être inventifs et débrouillards. Mais justement parce qu’on a besoin de l’intelligence et de la créativité de chacun d’eux, il faut tout faire pour qu’ils restent à l’école. Peut-être découvriront-ils un champ d’intérêt, un lieu de passion, un domaine où il faudra se battre.

Il y a 100 ans, il n’y avait peu d’avenir. Le choix était de soit subir le père-patron sur la ferme jusqu’à ce qu’il meure, soit d’aller mourir à la mine ou dans l’usine. Oui les enfants des patrons avaient une autre vie possible, mais que les enfants des patrons.

C’est pourtant évident que cette école qu’on juge si médiocre n’a jamais formé autant d’experts, d’ingénieurs, de chercheurs et d’artistes. C’est pourtant évident que le niveau de connaissance dans la population est largement supérieur à ce qu’il était il y a 50 ans. Bien sûr, dans nos pays développés il y a encore entre 10 et 20 % de gens qui ne peuvent pas lire. C’est quand même mieux que le 60% de 1950. Oui, il y a de l’espoir, tant que nous avons de l’espoir pour chacun des jeunes, il y en aura pour chacun d’eux. Et si nous n’avons pas d’espoir en eux, quel espoir reste-t-il pour nous? Ne serait-ce pas la preuve de notre total échec?

Bien sûr, il reste encore des écoles pour les enfants des riches, où ils apprennent à diriger. C’est pour cela que je prends la résolution de défendre l’école publique. Voilà l’espoir d’un monde peut-être pas meilleur, mais je l’espère différent.