J'ai besoin de votre avis
vendredi 12 septembre 2008, 02:14 Conte Lien permanent
Je suis en train d'écrire un truc un peu plus long sur les gens de la Wollustouk. J'ai envie d'y insérer des contes, mais les contes c'est de l'oral, ça ne se lit pas. Je tente donc un style d'écriture entre les deux et je voudrais savoir si ça passe, si vous aimez cela. Important, ça se passe il y a 500 ans, et le héros, j'en ai déjà parlé ici, s'appelle Mains-de-Feu.
Le conteur s'assoit sur ses talons dans un équilibre instable, mais très théâtral, il évalue son public, contera-t-il, ne contera-t-il pas et si oui, que contera-t-il si la demande se montre assez forte? C'est manifestement un code... il aimerait bien continuer, mais il faut des spectateurs pour qu'il y ait spectacle. Et encore plus, il faut que le public ait du talent pour que le conteur puisse exceller. Alors il se fait prier... hésite et se plaint qu'il est très tard... qu'il doit dormir parce que demain, mais on lui demande :
--dit nous quand la Tortue attrape une baleine
--non dit nous Glouskap et le grand castor
--Je veux quand Tortue épouse la préférée du Sagamo, une voix de fille bien sûr, à laquelle une autre fille répond :
-- Non je veux les noces de Mikumwesu ou bien quand Mikumwesu détruit le faux Glouskap
Le conteur prend une grande inspiration, regarde l'assistance et soudain accroche le regard de Mains de feu et sans que son regard ne quitte le responsable du savoir des canots, il dit d'une voix très grave:
--) Koluscabé chassait le mammouth dans la plaine sans arbre...
Tout de suite un grand haaaaaa monte de l'assistance, un conte des origines. Le véritable sens n'en était pas facilement donné, il fallait comprendre le contexte, pourquoi il était dit maintenant, évaluer les nuances. Le bon conteur cachait bien les clés, Il arrivait que le conte terminé l'assistance se perde en palabres sans créer un accord.
--) pourquoi ne prononces-tu pas Glouscap comme tout le monde?
--) Parce que je suis Nojitacwin, je suis le responsable des mots depuis que nous marchons près de la Rivière, et maintenant il me faut dire Koluscabé, parce que c'est lui qui chassait le mammouth.
Après avoir remis l'impudent à sa place, le conteur se replie sur lui-même, ferme les yeux et attend qu'un silence complet se fasse. Et après un long moment, avec seulement le craquement du feu, il commence d'une voix très douce à psalmodier plutôt que dire. Il fallait vraiment tendre l'oreille pour entendre les mots, mais ce ne sont pas des mots, c'est le bruit du vent froid. Les pas des marcheurs très las dans la maigre neige qui ne recouvre pas le foin jauni. L'effort de la survie de ces gens montés du sud et qui sont maintenant à la frontière du possible.
Le glacier a reculé jusque-là. Une énorme falaise de glace, si haute, si haute quelle est infranchissable. Le pâle soleil allume des brillants, dans la face terrible, et à son pied, ils sont là, coincés, les mammouths.
Cela fait plus d'une lune que le peuple suit Koluscabé, ils ont froid, ils ont faim, ils sont si fatigués, mais voilà maintenant la récompense promise, il y a de quoi manger pour deux hivers, la fin du voyage, la chaleur des peaux et le bonheur pour tous.
Ici sur la petite colline, on voit bien le grand troupeau, mais aussi les prédateurs du troupeau, énormes tigres aux dents de sabres, qui n'osent attaquer parce que le troupeau va se défendre. Aussi des loups des caribous et bien d'autres animaux encore... et l'ultime prédateur : la faim. Il y a trop de bêtes et plus d'herbe. Il y a trop de bêtes pour que les prédateurs puissent organiser une chasse, ils seront piétinés par les affamés.
Les loups sentent les nouveaux arrivants et fuient en longeant la falaise. Il reviendront après, quand il y aura à manger, quel que soit le vainqueur, quels que soit ceux qui meurent.
Koluscabé a bien préparé son attaque, les dix hommes convenus armés de lourdes lances vont se cacher au pied du guide. Il crie, il lance le défi! Du troupeau se détache une énorme bête, le champion. Sa laine coule jusqu'au sol si bien qu'on a l'impression de voir une montagne couverte d'herbe sèche... La bête répondra au défi, assez lentement d'abord puis de plus en plus vite la bête fonce vers les insolents, et là, tout près, dix lances volent et frappent l'animal qui stoppe sous le choc, vacille et tombe. Koluscabé sort son couteau et vite va trancher la gorge de la victime, il ne faut pas qu'elle souffre.
Maintenant la voix du conteur enfle et roule comme le tonnerre et le troupeau se lance dans la course vers les assaillants et les lances volent, les bêtes tombent, c'est la victoire.
Le teuïkan du conteur est prêt. Les premiers coups de la main sur le tambour, sont un appel à la prière. Il faut remercier ces bêtes qui ont accepté le sacrifice pour que le peuple vive. Le combat a été juste. Cette fois-ci les hommes ont gagné, mais combien de fois, ils perdront.
Commentaires
le captcha est particulièrement de mauvaise humeur aujourd'hui, mais svp, j'aimerais savoir ce que vous pensez de ce texte
J'aime bien de cette façon. Et la suite?
Je vais l'écrire dans quelques minutes, ce que je n,ai pas dit c'est qu'il y en a 50 pages avant.
Et on peut avoir aussi quand la Tortue attrape une baleine ? Hein ? STP aller ...
J'écoute le conteur assis dans la neige et les yeux écarquillés. Maintenant le conteur s'est tu et je m'aperçois que j'ai froid aux fesses.
Andrem--) t'avais qu'à t'assoir sur une fourrure ou sur une buche. Mais je suis d'accord que le conteur sait nous transporter ailleurs, et nous faire oublier le lieu où nous sommes.
Tilli--) Tu as bien raison, mais aussi c'est une de mes préférées, je vais en tenter une version écrite, bientôt. C'est conte pour enfant dont le propos est, les exploits des héros sont impressionnants mais ce sont les petits efforts soutenus qui donnent de vrai résultats. Ma mère le concluait en disant : le temps se moque de ce qu'on fait sans lui... j'ai mis bien du temps à comprendre cette phrase là.
mais...mais... et ben alors.... la suite!!! .... tu nous dis, c'est long, c'est long, mais on a à peine commencer, on est pris en plein dans l'ambiance, l'atmosphère, au coin du feu, les yeux écarquillés, volant vers cette falaise de glace, ces géants, dans ce défi, sentant une vérité primaire (primale?) poindre...et ça s'arrête!! Des comptes comme ça, j'en veux des pages! Je te l'ai déjà dit, mais je le répète, tu as une manière d'écrire qui est merveilleuse et fascinante et qui m'envoute complétement. Alors je t'en prie, je t'en supplie, j'en redemande!

...et je suis sans doute très stupide ou très superficielle, mais je ne comprends pas la phrase de ta maman
Nab--) le temps se moque de ce qu'on fait sans lui... si tu ne prends pas le temps de bien faire, ce que tu as fait disparaitra tout de suite.
ben je rejoinds l'assemblée ici présente, je m'installe tranquillou pour la suite! Ca en dit assez sur ce que j'en pense non?
En plus je tremble un peu, ça me donne des émotions ton récit!
"il faut donner du temps au temps" ...Certe,mais "la cour ne dort pas!"...et les fesses devant l'ordi,je prends "une bûche",tant le retour à la réalité est "glacial"!l
Les petits cailloux de l'attente sont-ils semés?...
C'est qui au juste Nojitacwin, le responsable des mots ? Cela m'intrigue !
Bon ben tu sais déjà ce que j'en pense, mais j'aime toujours autant
C'est un vrai conte, l'histoire des mammouths et des smilodons?
Nanouk--) C'est une partie du conte des origines, avec le grand lac des Porc-Épics dont le reste est le lac Témiscouata... j'en fait ma version bien sûr, mais la trace sur le territoire est continue depuis 11000 ans ( il parait).
Saveur--) le conteur, tout le monde peut dire des contes bien sûr, mais il y en a un responsable de maintenir le lien entre toutes les époques.
Jeanne--) ça vient ça vient... mais 300 pages c'est long à écrire
Candy--) j'en connais d'autres bouts frissonnants.
J'aime et j'attends la suite.
Et j'aime assez le principe du conte en feuilleton en fait
J'aime bien le personnage du conteur et l'histoire qu'il raconte me rappelle des souvenirs.
Du rabe, du rabe!
[Grrr, mon commentaire a été mangé l'autre matin]
Moi aussi, je me suis installée, le feu crépitait, et...j'attends la suite, la bouche ouverte !
Quand à la phrase de ta mère, je la retiens précieusement...
Moi aussi j'attends la suite. Est-ce que les mamouths sont passés par le détroit de Béring eux aussi ?
Oxygène--) je ne sais pas belle question, sans doute oui, que les hommes suivent les mammouths et les caribous, depuis l'Asie. Probablement que ce sont les caribous qui migrent et les hommes qui les suivent pour survivre.
Lise--) Bientôt plus de ce foutu captcha, si tu savais comme j'ai hâte... Nojitacwin n'est pas prêt, il se laisse désirer.
Amsides+TTo2+ Heidi--) ça vient ça vient...
oui la suite mais lors on n'aura pas les cinquante 1ères pages? On les retrouve où ?
Moi je veux tout tout tout!
Bey--) laisse-moi un petit mois et je livre le tout entre deux trucs en carton.
Ca se lit très bien, mais il est vrai que pour apprécier réellement il nous faudrait l'amont et l'aval de ton histoire.
Et si tu nous la proposais depuis le commencement comme une série ?
Névrosia--) oui et très bientôt, mais sur du papier et entre deux cartons avec un beau titre dessus.
on est vite plongé dans l'ambiance et prêt à écouter, même si le début cafouille un peu...dans les "dis-nous", il faut comprendre que les gens du public évoquent des contes connus mais pas forcément de celui qui lui (nous en l'occurrence). Mais on a hâte d'écouter la suite !:)
je vous lais dire "celui qui lit" !;)