reprise: la fin des Béothuk
mercredi 28 juillet 2010, 11:18 General Lien permanent
Voici la suite. Je crains toujours quand je mets ce genre de texte en ligne, d'ennuyer les gens. C'est une histoire tellement triste. Petite note puisque j'accuse ici, les enfants ne sont pas responsables des crimes de leurs parents. Mais c'est utile qu'ils en prennent conscience, ça pourrait leur éviter de recommencer.
Les Béothuks ont survécu à l' Arctique, à l'arrivée sur leur territoire des redoutables Inuit, aux pêcheurs de toute l'Europe et à leurs maladies. Mais la pression est énorme. Mais voilà pire que la peste, les Anglais s'installent.
En 1765, Sir Hugh Palliser, est au marché de la Baie des Chateaux, sur la cote du Labrador, le second en importance dans le Golfe après le marché de Tadoussac. Il raconte qu'en plus des très nombreux Innus, il y a 500 Inuit et plus de 1000 Béothuks. C'est beaucoup. Certains ethnologues pensent qu'il n'y a jamais eu plus de 800 Béothuks (grossière sous-évaluation). S'il y en avait 1000 au marché, il y en avait encore beaucoup plus que 2000 sur l'Ile et ça se serait vraiment un grand nombre. Mais ça démontre que toutes les tentatives pour évaluer les populations alghonkiennes sont sujet à beaucoup beaucoup de prudence.
Palliser était là bien sûr pour distribuer des couvertures qui avaient servi dans les hôpitaux anglais appliquant la guerre bactériologique, arme favorite des anglais. Ce n'est qu'un autre épisode dans la guerre de soumission et d'extermination qu'ils ont mené partout en Amérique, en Afrique et en Asie. Ils sont la civilisation, et poursuivront leur mission civilisatrice avec l'acharnement des croisés.
Sur l'Ile de Terre-Neuve, la pression est extrême. Le lieutenant de marine Cartwright (1765) a mandat de débarrasser l'Ile de tout ce qui pourrait nuire à la colonisation. Les Béothuk tenteront un peu de se défendre, mais contre les fusils et l'organisation militaire anglaise ce peuple très pacifique n'est vraiment pas capable de résister.
Un grand nombre sans doute traverseront le détroit de Belle-Isle pour se joindre aux Innus quelques autres profiteront des grands rabaskas des Mi'kmaq pour descendre au Sud. Combien? Impossible de le savoir, ces gens sont des experts de la forêt. Ils ont toujours vécu en petits groupes totalement autarciques, ils vivent avec la forêt. Le fondement de leur morale est la fuite, le refus de la violence, et depuis qu'ils pratiquent cet art. Ils en sont devenus les champions, alors comment savoir les dénombrer?
Cependant en 1765 ça fait déjà 150 ans qu'il y a des anglais sur l'Ile ( le groupe de John Guy en 1612). 150 ans qu'on répète la devise connue: un bon sauvage est un sauvage mort. Ont-ils réussi à préserver leurs coutumes si particulières? J'en doute, la pression était trop forte. Ils sont plutôt devenus des presqu'Innus des presque Listigouche, des presque Souriquois... répétant quand ils sont seuls les chants antiques, les danses bizarres.
Carthwright a bien fait son travail en 1768, il resterait moins de 400 Béothuks sur l'Ile. En 1819, Démasduit, la dernière mère de clan a vu ses deux derniers protecteurs tués par John Peyton, et son bébé écartelé vivant par les mains de l'anglais. Après cela, pourquoi survivre?
Peyton capturera un peu plus tard une jeune femme qu'il réduira en esclavage et tua douze membre de son clan. Sha-nan-dithit avait 20ans, elle ne voulait pas quitter l'ile et c'est sans doute, malheureusement pour elle, sa grande beauté qui l'a sauvé. Elle a laissé une série de dessins très particulier, mais mourut de tuberculose à 29 ans le 6 juin 1929. La dernière a pouvoir dire : je suis Béothuk.
Commentaires
Je sais que cela n'a rien à voir avec ton billet (mais pourtant) !!!
"VIVE LA CATALOGNE"
Nous ennuyer ? Pour ma part, je trouve ça passionnant. Oui, c'est une histoire triste, comme l'est souvent la réalité. Pour moi qui vis en Europe, il est important d'apprendre à connaître l'histoire de ces peuples et je te dis merci de le faire si bien.
Une histoire bien triste. Et qui s'est malheureusement répétée et se répète encore un peu partout sur la planète. Alors il faut la redire encore et encore, pour que demain, plus personne ne soit le dernier de son peuple et de sa culture.
(et comme Alain: vive la Catalogne!)
Non, tu ne m'ennuies pas du tout avec ce genre de récit, au contraire. Mais par contre ça me laisse le cœur lourd de chagrin à l'idée de ce que les humains sont capables de faire à leurs semblables. Je n'avais jamais entendu parler de la guerre biologique utilisant les couvertures contaminées. En faisant une petite recherche, j'ai trouvé que le premier à avoir utilisé cette arme contre les tribus indiennes était un Suisse, engagé dans l'armée britannique, né à une cinquantaine de kilomètres de chez moi !
Loulou--) je fais peut-être un mauvais lien, mais je suis incapable de séparer cette volonté de détruire les autres de fanatisme religieux, du protestantisme qui a tant marqué des gens de ton pays. Il faudra bien que je fasse un papier là-dessus.
Nanouk--) cette rage de vouloir détruire les autres parce qu'on a raison... un désastre.
Constance--) l'occident chrétien et civilisateur... il faudrait bien pouvoir en faire une critique.
Alain--) Vive la Catalogne!!!! je suis bien d'accord avec toi. Et merci de me donner l'occasion de le répéter. C'est le droit à la différence que tu célèbre, que nous célébrons.