Reprise du dimanche: Les trois soeurs

C'est le temps des récoltes. c'est donc le temps d'un hommage aux trois soeurs, nos mères nourricières. Il est possible de faire de l'agriculture autrement.

Les agronomes, les ingénieurs agricoles, les experts en phytocides vous diront que la monoculture intensive est la seule méthode rentable d’exploitation du territoire. Oui, c’est comme cela qu’il faut maintenant appeler l’agriculture l’exploitation du territoire. Oui, c’est bien d’exploitation qu’il s’agit, l’abus de la terre jusqu’à la destruction de toute vie dans le sol.

Pourtant, il existe une méthode tout aussi rentable de production des aliments, qui ne nécessite pas de labourage, donc pas de super-tracteur qui compacte le sol, pas d’engrais chimique, pas de pesticide. Tout aussi rentable parce que justement elle ne nécessite pas de tuer toute la vie pour forcer une monoculture qui est justement le contraire de la vie. La vie étant essentiellement l’équilibre, la collaboration des espèces pour le maintient de l’équilibre.

Nous sommes justement au cœur du paradoxe agricole. Les humains se percevant comme au-dessus de la vie, et dehors de la vie, veulent la plier à son seul profit. Ils se perçoivent en concurrence avec la vie, ce sera eux ou la vie. J’ai bien peur qu’il gagne.

Pour cultiver selon la méthode des trois sœurs, très simple. On construit une petite butte d’une quarantaine de centimètres par deux mètre de diamètres environ, comme on ne marche pas sur la butte elle servira pour la prochaine centaine d’années. Pour le phosphore on met un poisson dedans. Au centre, on plante le maïs, autour du maïs on plante les haricots, en bas on plante les courges.

Le maïs ne peut pas pousser de façon naturelle, c’est une plante fabriquée par les gens de la culture Nahuatl. Il ne peut pas pousser parce qu’il a besoin de plus d’azote que les sols peuvent en fournir. Par contre, les haricots sont des légumineuses qui ont des nodules dans les racines. Ces nodules travaillent en symbiose avec des petits champignons ( les mycorhizes) pour fixer l’azote de l’air de façon à le rendre consommable par les plantes. Les haricots ont besoin de support pour éviter que les gousses s’entassent au sol et pourrissent. Le maïs fournit le support en échange de l’azote.

Ces plantes ont besoin d’une humidité contrôlée et surtout ne sont pas efficaces pour lutter contre les plantes envahissantes. Alors, les larges feuilles des courges empêchent l’évaporation, absorbent le surplus d’eau et surtout empêchent les autres plantes d’étouffer le maïs et les haricots. Il y a toute une gamme de substitutions possibles pour cultiver d’autres plantes selon le même programme.

Pas de pesticide, pas d’engrais chimiques, pas de désherbage, pas de compaction des sols, que demander de mieux? Évidemment, on ne peut pas récolter avec les méga-moissonneuses qui polluent nos campagnes. Les coûts de main-d’œuvre supplémentaires sont largement compensés par l’absence des coûts des intrants qu’exige la mono-culture.

Aussi de plus en plus pour empêcher ce genre de solutions, les états subventionnent les intrants plutôt que la main-d’œuvre. Cela nous assure d’avoir dans les villes une réserve de chômeurs prêts à accepter n’importe quoi pour survivre.