La fin des livres suite- La spécificité humaine.
lundi 28 avril 2008, 23:50 General Lien permanent
Ce n'est pas le langage qui est le propre de l'humain, mais l'écrit. Homo plus ou moins sapiens, serait un animal comme les autres s'il n'y avait réussi à développer la bibliothèque. La fin du livre, du moins sa dématérialisation entrainera à mon avis un animal nouveau. C'est mon grand espoir.
Toutes les espèces animales plus évoluées que les vers de terre, passent un savoir d'une génération à l'autre. Les chants d'oiseaux sont des acquis, transmis par les parents, les abeilles apprennent les danses qu'elles adapteront pour décrire le territoire, les épaulards vénèrent les vieilles qui gardent les chants qui décrivent les routes et qu'elles apprennent aux jeunes, les humains dessinent dans les grottes les techniques de chasse pour que les enfants sachent. Jusque-là, toutes les espèces ont des stratégies similaires pour transmettre le savoir d'une génération à l'autre.
Justement la spécifité humaine c'est que le message n'est pas volatile, ce n'est pas une odeur ou un chant, mais un dessin qui durera, que nous pourrons consulter génération après génération. Le message ne se limite plus à ce qu'une mère aussi brillante soit-elle, peut dire à son enfant l'ayant appris de sa mère et l'après l'avoir perfectionné, mais le bébé humain aura bientôt accès au savoir de milliers et puis de millions de mères et de pères, et de spécialistes dont la seule fonction est d'augmenter ce savoir. Le livre, c'est ça! Avoir accès à l'expérience des autres de notre espèce.
Bien sûr, c'est un pouvoir terrible. Tous les états, toutes les religions ont tenté de limiter ce pouvoir, d'empêcher les humains d'avoir accès à la bibliothèque, parce que le savoir, c'est le pouvoir. L'imprimé a permis le protestantisme, le « je pense donc je suis » et une course à toujours plus de savoir, pour gagner du pouvoir sur les autres. Heureusement, cette course a débouché sur L'Internet, où maintenant, presque tout le savoir, est accessible presque tout le temps à presque tout le monde. Le seul combat valable est de voir diminuer la taille de ces « presque ».
L'interface ordinateur-portable est encore bien gauche pour nous livrer instantanément tout ce savoir. J'ai assisté hier à une conversation entre une jeune Allemande et un Asiatique ( je dirais japonais mais pas sûr). Les deux parlaient à leur téléphone portable via l'oreillette, et un service de traduction probablement automatique tentait de traduire. Je dis probablement automatique, parce qu'à les voir rire, je suppose que la traduction est encore très gauche. Voilà le « Babel Fish » encore en enfance, mais déjà vivant.
Il est devenu totalement ridicule de faire perdre la moindre minute à nos enfants pour qu'ils apprennent l'orthographe, les tables de multiplication, la géographie, la chimie, la physique, etc. Nous devons tout mettre nos efforts à ce qu'ils apprennent à apprendre. Le savoir est là, directement accessible, le seul vrai problème est de le trouver dans le fatras.
Il est temps de sortir de la grotte de nos ancêtres, le savoir n'a plus à être matériellement écrit sur la pierre. Le papier semble un peu plus transportable, mais il n'y a plus de bibliothèque assez grande pour contenir le centième du savoir disponible sur l'Internet. Le livre électronique n'est qu'une interface bien temporaire. La connexion Silicone-Neurone commence, et bientôt nous aurons greffé dans le bras un accès à tout le savoir: il faut juste apprendre à survivre.
Commentaires
Ouais. Je reprends ma grève.
Et le capchka qui me demande la couleur du cheval blanc de napoléon, comment je réponds si je n'ai pas appris tout ce que tu dis qu'il ne faut pas apprendre?
Andrem--) je te propose d'apprendre à apprendre... parce que tout le savoir est disponible. Alors si tu ne sais pas, demandes à gougueule. et Après tu pourras creuser d'avantage.
Fais pas la grève andrem, on apprend avec 3 niiveaux différents (plus selon les auteurs), on apprend par ce que l'on comprend (niveau cognitif), on apprend par ce que l'on ressent (niveau émotionnel) et aussi, et c'est là ou Moukmouk a raison le plus fort, on apprend par la représentation de ce qu'on apprend et comment on apprend (niveau métacognitif). Pour le dire autrement, on apprend d'autant mieux qu'on sait comment on apprend, quelle stratégie d'apprentissage on a. C'est apprendre à apprendre. Et c'est un champ absolument extraordinaire.
Pour réduire les barrières de l'accès au savoir, il ne faut pas oublier de combattre les DRM, ces verrous numériques qui veulent contrôler que chacun paie son écot, quitte à le faire payer plusieurs fois (pour chaque changement de machine) et quitte à priver les pauvres de l'accès à la culture (à une époque où le coût de cet accès devient nul !). Et qui auraient pour conséquence de supprimer la possibilité de prêt ou de don d'un livre virtuel. Sans compter le risque d'enfermer le savoir dans un coffre-fort dont les clés seraient détenues par des sociétés d'informatique, qui en feraient payer cher l'accès, alors que leur contribution se limite à ce gardiennage...
Du point de vue de mon fils, un livre, si tu ne peux pas le macher, ca n'a pas grand interet
Comme je disais, vu la faiblesse des supports a long terme, je crois que je vais garder mon edition de 1902 des Just So Stories.
Mais je suis pour la diffusion par le net. Meme si je publiais un livre, il aurait du mal a atteindre en tirage les milliers de lecteurs qui feuillettent mes pages. Et qui impriment, souvent, ce qui leur a plu...
Comme bibu d'A'toshka. J'aime bien corner, machouiller, renifler, surligner, faire des tampons chinois et des dessins sur mes livres, m'endormir dessus, ou dessous au soleil.
Le livre c'est un peu comme un cheri en fait, les emails c'est rigolo, mais j'ai besoin du contact physique (et de m'endormir dessous ou dessus).
A'toshka+Drenka--) Il me semble que je ne parle pas de l'élimination de tous les livres, je ne pense pas que l'arrivée de la télé a éliminé la peinture. Sauf que le mode de distribution des images le plus utilisé maintenant c'est la télé ( l'Internet est en train de battre la télé).
Et vive tes carnets à dessins, qui sont distribués électroniquement après.
Pour Drenka tu ne veux pas recevoir directement sans passer par les yeux le texte du roman pendant que tu t'exposes au rayon du soleil, une serviette sur la tête?
Lune--) La question des droits d'auteurs demeure pour moi un immense problème. Bien sur que je veux que les auteurs soient payés. Actuellement l'essentiel du fric va à des éditeurs, et des imprimeurs. Comment s'assurer que les auteurs reçoivent une juste récompense pour l'effort?
Saveur--) merci, cette transformation de la pédagogie entraine un changement du rôle de l'école, qui sera de moins en moins le mécanisme de sélection des classes sociales. Beaucoup d'enseignants voient ce changement comme une dévalorisation de leurs statut, alors que pour moi, ça devrait être l'objectif premier: faire avancer chacun des enfants sans les éliminer de l'école.
je pense en disant cela à ma propre discipline évidemment, mais le savoir n'est pas un ensemble d'énoncés que tu lis sur un écran, c'est dans beaucoup de cas des savoirs-faire à acquérir et si tu arrives à apprendre les maths à qqun simplement en lui faisant lire l'ensemble des articles de maths de wikipedia, je suis prêt à partir étudier les ours polaires sur la banquise.
(tiens justement les ours polaires je ne pense pas que je puisse vraiment les étudier et les comprendre depuis mon ordi)
Tirui--) c'est ce que je dis quand je parle d'apprendre à apprendre. Ce qu'un enseignant peut faire c'est créer le contexte où l'apprenant évoluera. Mais c'est l'apprenant qui fait la démarche... L'écran comme l'enseignant ne sont pas meilleur pour apprendre à celui qui n'est pas en contexte d'apprentissage.
Oui, c'est du socio-constructivisme... je ne cacherai pas mon point de vue là-dessus.
Je ne trouve qu'un inconvénient à internet: si je passe ma journée devant un écran, je vais avoir les yeux affreusement douloureux, chose qui ne m'arrive pas avec un livre, mais bon, à part ça, c'est effectivement un instrument fabuleux, ne serait-ce que pour la communication.
Tout est à portée de main sur internet: le savoir, mais aussi la famille et les amis, tout tout tout... mais il ne faudrait tout de même pas qu'il remplace tout ce qu'on a
huhu...le socioconstructivisme...j'ai 1 ou 2 bonnes vannes là-dessus mais je ne vais pas vous les dire : je passerai pour une iconoclaste