Grava Lax

Je voulais vous parler de la loi anti-effet de serre qui se discute aux USA. J'attends à demain. Il y a une urgence, Oxygène veut la recette du Grava Lax.

D'abord le nom : Grava Lax. Grava c'est assez facile, c'est le même mot qu'en anglais : Grave : tombeau. Lax c'est le mot qui a donné loch en gaélique, lacus en latin et lac en français. Dans ce cas là, il ne s'agit pas du lac mais de son contenu, le poisson de lac, essentiellement les salmonidés.

C'est une pratique de tous les inuvialuit, de tous les habitants du Nord. On lève la tourbe, et on creuse un trou dans le pergélisol. Voilà notre tombeau. On met un peu de branches pour être sur que le poisson ne touche pas l'eau du poisson ou de la fonte, et un rang de filet de poisson avec la peau, un rang d'un mélange de sel, un rang de poisson, un rang de sel jusqu'en haut, quelques peaux de phoques des pierres et la tourbe de façon à ce que personne ne trouve où est la cachette. Et voilà nous avons un réserve de nourriture qui peut tenir plusieurs années. Le grand danger c'est le formidable odorat des ours polaires.

Mais pour les ours, le sucre était (mais n'est plus) une odeur signifiant le danger. Alors, les Nordiques d'ici faisaient un long voyage de 2000 kilomètres pour échanger au marché de Tadoussac, le sucre d'érable et de bouleau des Innus et des Wollustoukii contre des peaux phoques et surtout les fameuses pierres de Ramah qui font les meilleurs couteaux qu'on puisse imaginer. Je ne sais pas où les Samis, les Norsk et autres nordiques d'Europe trouvaient le sucre, mais je sais d'un Finnois qu'ils en avaient.

Les Wollustoukii, ceux de la belle Rivière, qui sont plus des pêcheurs que des chasseurs, ont vite adopté cette technique. Ils savaient fumer le poisson comme les Innus, mais le poisson fumé sent trop pour qu'on le conserve dans une réserve enterrée. Les renards, les ratons laveurs, et plusieurs petits animaux ont vite fait d'ouvrir les caches.

Donc pour faire le Grava Lax, on fait un mélange à part égal de gros sel et de sucre brun ou cassonade, rien de dispendieux ça ne fait pas de différence dans le goût. Dans une grande casserole peu profonde, on assoit un journal. Le poisson va rendre de l'eau un jus assez odorant et pas très bon, il ne faut pas que notre saumon trempe dedans. On prend un filet de truite ou de saumon qu'on installe coté peau sur le journal. Moi, je mets un peu de poivre et d'estragon sur le filet, parce que j'aime l'estragon, mais ce n'est pas nécessaire. Ensuite je couvre généreusement de notre mélange sel-sucre. Hop, sur le frigo et j'attends.

Si c'est pour le repas du soir, six ou sept heures pour un saumon, quatre ou cinq pour une truite. Si on veut conserver notre truite hors du frigo pour plusieurs jours parce que la pêche a été fantastique et on ne sait plus où mettre les poissons, on laissera notre truite deux jours dans le mélange.

Pour servir, il faut détailler comme le saumon fumé en tranche fine en partant du dos vers le ventre, et non pas de la tête vers la queue. C'est très important, ça change beaucoup le goût parce qu'on ne pas couper les fibres musculaires à contre.

Oxygène me demande si c'est des croquettes pour les ours, la réponse est très certainement oui.

Edit du matin: Avant de détailler, il faut laver un peu pour enlever le mélange sel-sucre, et il n'y a pas d'autre cuisson, c'est le mélange qui cuit le poisson.